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SÉCURITÉ ROUTIÈRE
Paris, le 21 octobre 2005

Beaucoup de bruit avec la bouche...

Beaucoup de bruit avec la bouche...

Les Etats généraux de la sécurité routière qui se tenaient hier à Paris ont réuni près de 800 personnes dont une belle brochette de ministres. Pour n'aboutir à rien d'autre que "du bruit avec la bouche", selon l'expression de Sarkozy himself...

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Avec pas moins de cinq ministres (sur huit prévus) et près de 800 invités provenant du monde associatif, politique, juridique, policier ou médical, les deuxièmes Etats généraux de la sécurité routière avaient vu les choses en grand sur le thème du "nouvel élan" de 2005.

Les abords du Palais Brongniart (l'ancienne Bourse de Paris), théâtre du grand show gouvernemental, avaient été consciencieusement quadrillés par les forces de l'ordre pour accueillir le traditionnel ballet des grands jours : 607 grises, monospaces noirs et TDM banalisées occupaient largement le terrain, à tel point que se garer à proximité relevait presque de la mission impossible, même à moto !

A l'intérieur en revanche, ni les trois écrans géants, ni la retransmission simultanée sous plusieurs angles, ni la présentation par Bernard de la Villardière (M6), ni le prestige des orateurs (Nicolas Sarkozy pour l'intérieur, Dominique Perben pour les transports, Gilles de Robien pour l'Education nationale, Pascal Clément pour la justice, Dominique Galouzeau de Villepin pour le premier d'entre eux, etc.) ni la salle bondée ne sont malheureusement parvenus à faire oublier la vacuité des "débats"...

2èmes états généraux de la sécurité routière : beaucoup de bruit avec la bouche...

Car hormis un concert d'autosatisfaction abondamment repris par l'ensemble des intervenants - "les radars automatiques c'est bien, mais y en a pas assez", déplorait par exemple "spontanément" l'une des personnes interrogées dans un "micro trottoir" de niveau TF1 (Robert Namias, DG adjoint de ce fleuron de l'exception culturelle française, comptait d'ailleurs au nombre des orateurs au titre de président du CNSR, lire notamment Moto-Net du 7 avril 2004) -, les "débats" n'ont pas fait éclore la moindre amorce de mesurette concrète qui aurait pu permettre de sortir de l'ornière tracée par les stéréotypes neuneus et les formules chocs stériles.

Assassins de la route

"Ce qui est important, c'est que la seule faute qu'ont commise les victimes est d'avoir croisé la route d'un assassin de la route", a notamment fait savoir en ouvrant les débats Nicolas Sarkozy, passé maître dans l'art des formules obscènes, avant de préciser que "tout le reste, c'est du bruit avec la bouche"...

Sans se rendre compte que c'est précisément ce qui allait se produire tout l'après-midi, le ministre de l'intérieur n'a bien entendu pas manqué de rappeler son amour transi pour les radars automatiques, tellement "rentrés dans les moeurs qu'ils ne suscitent plus de polémique (sic !) et qui sont même de moins en moins vandalisés", s'est réjoui le favori de 2007, réalisant dans le même temps "qu'il suffit que je dise ça pour que ça se reproduise, je n'aurai pas dû"...

Contrôles des plaques des motos

Les radars automatiques ne seraient-ils donc finalement pas si bien rentrés dans les moeurs que ça ? Que nenni : le seul problème de ces machines à réprimer aveuglément, c'est que "les motards passent encore facilement entre les mailles du filet", a déploré l'inénarrable Sarko, qui a donc demandé à ses services de procéder "dans les semaines à venir" à "des actions de contrôles de la conformité des plaques d'immatriculation pour permettre une meilleure exploitation des clichés photographiques d'infraction".

Le but n'est bien entendu pas de "réprimer les motards, mais de les protéger y compris contre eux-mêmes", a précisé le ministre, car "n'oublions pas que les motards sont parmi les plus exposés des usagers de la route". Ainsi donc, selon le ministère de l'intérieur de la République française, les motos ne disposeraient pas de carrosserie et faire de la moto serait matériellement plus dangereux que conduire une voiture. Deux informations à prendre au conditionnel mais qui, on l'imagine, font déjà avancer considérablement les débats...

Le retour des feux de jour

Lui donnant du "cher Nicolas" en veux-tu en voilà, son homologue des transports Dominique Perben a subrepticement ressorti de leurs oubliettes les feux de jour (lire notre Dossier spécial), précisant que l'installation de feux dédiés sur les voitures neuves favoriserait le respect de "l'allumage diurne que nous recommandons"...

2èmes états généraux de la sécurité routière : beaucoup de bruit avec la bouche...

Seul Serge Morelli, président de l'assureur AXA Club 14, a timidement tenté de faire entendre une voix moins aveuglément démagogique en évoquant la nécessité d'adapter les règles de la route aux spécificités de la conduite d'une moto : "les motards dans leur ensemble ne sont pas opposés aux règles et ils ne seraient pas contre la répression à partir du moment où la place spécifique de la moto dans le flux de circulation serait prise en compte", a-t-il notamment rappelé.

Une allusion à peine voilée à la nécessité de pouvoir circuler raisonnablement entre les files et dans les voies de bus, ou de pouvoir se garer sur les trottoirs de façon non gênante, mais balayée comme il se doit pour non conformité avec la pensée unique de ce début de siècle : vous (motards, automobilistes, citoyens...) êtes des grands enfants. Vous ne savez pas ce qui est bon pour vous, donc laissez-nous faire tranquillement votre bien !

"100 chevaux, c'est délirant"

Tentant de préciser que "dans toutes les catégories d'usagers, il y a toujours 10% de comportements marginaux dont on parle" mais qui ne sont pas significatifs, Serge Morelli s'est vu renvoyer dans ses cordes par l'inébranlable Geneviève Jurgensen, pétrie de certitudes affligeantes et de bons sentiments stériles à l'égard des victimes de la route : "la dangerosité est liée à la puissance", a-t-elle subitement proclamé, estimant que "100 chevaux, c'est délirant" et assurant que "les piétons souffrent de la présence des motards, qui en tuent plus qu'ils ne le devraient"... Bigre !

Visiblement en plein délire, la porte-parole de la Ligue contre la violence routière a ensuite ouvertement reproché à TF1 d'avoir "diffusé Taxi en pleine semaine de la sécurité routière ! C'est comme si on passait La Grande bouffe pendant la semaine de la faim dans le monde !", s'est-elle - sérieusement ! - indignée... A quand l'interdiction de La crise dans les vidéo clubs en pleine période de chômage ?

Son incontournable compère le professeur Got, "expert" en sécurité routière depuis le siècle dernier, a de son côté regretté le temps où l'on pouvait "se faire plaisir avec des motos de 9 chevaux : aujourd'hui on va jusqu'à 100 chevaux mais avec la mort" a-t-il doctement souligné, rappelant que le principal "handicap" (sic) des motards, "c'est leur manque de protection"...

Peinant à dissimuler la joie intense qui l'anime à la vue d'un radar automatique caché dans les buissons, Claude Got a ensuite estimé qu'on n'avait "jamais vu la République travailler aussi bien" (sic !) que lors de l'installation du contrôle sanction automatisé. L'école gratuite et obligatoire pour tous, la laïcité, le droit de vote, la sécurité sociale ? Autant de bagatelles poussiéreuses qui auraient été avantageusement remplacées par une série de radars automatiques flambant neufs et de caméras de vidéosurveillance high-tech !

"La formation ne doit pas se faire au détriment de la répression car les radars ont montré leur efficacité", a par ailleurs déclaré Bernard Pottier, président de la Prévention (sic !) routière, qui demande "une heure par mois de formation, de la maternelle à la Terminale, avec un professeur référent comme l'a suggéré Gilles de Robien"...

2èmes états généraux de la sécurité routière : beaucoup de bruit avec la bouche...

Quatre heures plus tard, les débats se sont achevés comme ils avaient commencé : concluant comme le veut la tradition une après-midi à laquelle il n'avait pas assisté, le premier ministre Dominique Galouzeau de Villepin a énuméré une ou deux banalités de bon aloi sous une nuée de flashes.

Chacun est ensuite reparti campé sur ses positions, qui en métro qui en 607 officielle, sans que la moindre amorce d'avancée hors des sentiers battus de la répression tous azimuts, de la culpabilisation à outrance et des bons sentiments gluants, par exemple en responsabilisant une bonne fois pour toutes l'ensemble des usagers de la route, n'ait été envisagée une seconde...

2èmes états généraux de la sécurité routière : beaucoup de bruit avec la bouche...

Etait-il vraiment nécessaire de déplacer tout ce beau monde pour répéter jusqu'à l'écoeurement que "la vitesse c'est mal, les radars c'est bien" ? La prochaine fois, un petit encart publicitaire dans Paris Boum Boum ou autre gratuit local serait suffisant ! Enfin, roulez en paix, citoyens : le gouvernement, les associations de victimes et TF1 veillent sur vous...

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