Pour défendre les 80 km/h, Edouard Philippe a qualifié hier de "résultats historiques" les premiers chiffres de la mortalité routière en 2018. De son côté, l'association 40 millions d'automobilistes crie à la manipulation et maintient sa demande d'annulation de la mesure. Alors, qui a raison ? Les résultats 2018 sont-ils encore plus "historiques" que ceux de 2013, année de référence la plus basse ? Explications.
Selon le premier ministre, qui annonçait hier en direct le premier bilan officiel de la mortalité routière depuis l'entrée en vigueur des 80 km/h, les chiffres 2018 sont "historiques" avec 3259 tués en métropole, soit 189 de moins qu'en 2017.
"Le mot est parfois utilisé pas forcément à propos, mais en l'occurrence c'est vrai", a-t-il insisté depuis le Centre de réadaptation de Coubert (UGECAM IDF) : "depuis qu'on mesure l'accidentologie routière, il n'y a jamais eu aussi peu de morts sur les routes françaises. C'est l'année 2018 où l'on aura compté le moins de morts sur les routes françaises, métropole et départements d’outre-mer compris", a assuré Edouard Philippe (ci-dessus à gauche).
Moins de morts qu'en 2013, qui jusqu'à présent faisait figure d'année référence avec 3268 tués en métropole ? A priori oui, puisque neuf morts auraient donc été "évités" en 2018 par rapport à 2013. Sauf que ce n'est pas, mais alors pas du tout l'avis de l'association 40 millions d'automobilistes, dont le délégué général Pierre Chasseray (ci-dessus à droite) dénonce une "manipulation des chiffres" et "l'impartialité de la Sécurité routière"...
En réalité, l'explication se trouve de l'autre côté des océans. Car avec 148 tués en 2018 sur les routes de La Réunion, Mayotte, Guadeloupe, Guyane et Martinique (DOM) et 96 sur celles de Nouvelle Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Wallis-et-Futuna et Saint-Pierre-et-Miquelon (COM/POM), le total des morts de la route en France s'élève à 3503 en 2018.
Or en 2013, ce même décompte faisait apparaître un total de 3495 morts sur les routes françaises (3268 en métropole, 159 dans les DOM et 68 dans les COM/POM)... Dans ses propres calculs, l'association 40 millions d'automobilistes semble avoir oublié les collectivité d'outre-mer, mais n'en déplaise au gouvernement : l'année 2013 reste donc bien l'année "historique" avec huit morts de moins qu'en 2018 !
Rappelons en outre qu'il ne s'agit que de résultats provisoires pour 2018 puisque les chiffres définitifs ne seront connus, comme chaque année, que quelques mois plus tard. Et comme les chiffres définitifs publiés en mai/juin sont traditionnellement plus élevés que les chiffres provisoires annoncés en janvier, le bilan 2013 restera vraisemblablement le moins meurtrier. On peut donc d'ores et déjà estimer que les 80 km/h n'auront pas servi à grand chose... sauf bien sûr à augmenter les recettes des radars et amorcer le mouvement des Gilets jaunes.
De son côté, la Fédération française des motards en colère (FFMC) se réjouit de cette baisse de la mortalité routière en soulignant que les deux-roues motorisés y ont contribué (-4%), mais rappelle que la tendance est à la baisse depuis 1972 : "attribuer cette baisse à la nouvelle limitation à 80 km/h sur le réseau secondaire, c'est aller vite en besogne", tempère l'association de défense des motards en rappelant que "les accidents sont avant tout multifactoriels et que de toute façon, la mortalité routière est en baisse dans l'Union européenne depuis plus de 40 ans quand on l'observe sur des périodes longues".
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