La dernière des cinq journées de tests officiels au Qatar a tourné court à cause d'un vent soutenu qui a recouvert de sable la piste de Losail. Seuls quelques rares pilotes ont tenté une sortie, avec des chronos très éloignés des références précédentes.
Le vent s'est levé avec suffisamment de force sur le désert qatari pour remettre en cause la tenue de la troisième journée d'essais MotoGP de cette semaine, la cinquième en tout avec celles menées juste avant sur ce même circuit.
Outre les problématiques liées à ce vent, c'est surtout le sable déposé sur la piste qui s'est montré incompatible avec la poursuite des essais : les quelques MotoGP qui ont pris la piste soulevaient de véritables gerbes de sable et de poussières dans la ligne droite, contraignant même les commissaires de piste a interrompre le roulage pendant une heure pour tenter de nettoyer le bitume.
Tandis que la plupart des équipes quittaient la piste, Danilo Petrucci bouclait quelques tours avec sa KTM Tech3 dans les 1'58, soit à cinq secondes des meilleurs temps effectués la veille et l'avant-veille. Un rythme peu représentatif du potentiel du circuit. Même topo pour Stefan Bradl, Takaaki Nakagami et Pol Espargaro qui ont également tenté une sortie chronométrée.
Cette fin anticipée des essais MotoGP au Qatar place plusieurs pilotes en fâcheuse posture dans la mesure où cette dernière journée d'essais devait leur permettre de boucler des simulations de course pour valider - ou exclure - les pièces et réglages testés auparavant.
Cette lacune est d'autant plus préjudiciable qu'en raison du Covid toute l'intersaison s'est exceptionnellement concentrée sur le circuit qatari, qui lancera également la saison 2021 dimanche 28 mars ! Les équipes pas complètement à jour dans leur programme risquent littéralement la "traversée du désert" dans 15 jours…
A noter justement que le gouvernement qatari propose de vacciner les pilotes de Grands Prix ainsi que "tous ceux qui travaillent et voyagent avec le paddock" contre la Covid-19 afin d'assurer "la santé et la sécurité" de tous les membres de l'Intercontinental Circus. Cette décision intervient alors que le MotoGP aura passé un total de cinq semaines dans la Péninsule arabique !
"Le Qatar, qui a considérablement intensifié son rythme de vaccination contre la Covid-19 cette année, est en mesure - compte tenu de ses progrès - d’en proposer l’accès à tout le paddock itinérant du MotoGP", fait savoir le promoteur des Grands Prix, Dorna SPorts, qui évoque une "chance inouïe".
Sacrée chance en effet pour ce riche émirat d'avoir des doses de vaccin supplémentaires à mettre à disposition d'acteurs étrangers d'une compétition sportive, alors même que plusieurs pays - dont la France - manquent cruellement de stocks pour vacciner les personnes prioritaires de sa propre population !
L'un des principaux enseignements de cette intersaison exclusivement qatarie est que Ducati se positionne comme d'habitude comme le favori pour le Grand Prix du Qatar, tant ses Desmosedici s'y sont montrées performantes et véloces.
Jack Miller repart avec le nouveau record absolu du tracé en 1'53.183 et le sentiment du devoir accompli dans son nouveau rôle de pilote d'usine. L'australien s'est montré constructif dans son approche et ses commentaires, et peut se vanter d'être l'un des rares à avoir bouclé une véritable simulation de course avec des pneus usés.
Si "Jackass" conserve cette maturité et cette constance, il sera à n'en pas douter le grandissime favori le 28 mars. Son nouveau coéquipier Franco Bagnaia sera également un prétendant sérieux pour la victoire, en témoignent ses longues séries de tours prometteuses.
Autre pilote Ducati capable de briller : Johann Zarco, qui s'est montré bluffant sur sa nouvelle Ducati-Pramac aux spécifications d'usine. Le cannois manque encore d'un peu de rythme en configuration course, mais il a longuement tourné (jusqu'à 71 tours par jour !) pour comprendre sa moto en pneus usés.
Autre domaine dans lequel Johann s'est illustré : la vitesse de pointe ! Le n°5 repart d'ailleurs du Qatar avec le nouveau record en la matière avec un étourdissant 357,6 km/h mesurés l'avant-dernier jour ! Le français colle plus de 15 km/h aux Yamaha, qui plafonnent laborieusement à 340 km/h !
Le record précédent - déjà propriété de Ducati - était de 356,7 km/h au Mugello : Johann peut parfaitement envisager viser la barre des 360 km/h en Toscane dans la mesure où la ligne droite du Mugello est un peu plus longue qu'au Qatar (1141 m contre 1068). Fortiche de la part de Ducati, sachant que les moteurs sont similaires à l'an passé !
Autre enseignement de ces essais au Qatar : Yamaha ne semble pas avoir rattrapé son retard sur ses concurents, Ducati et Honda en tête. Bien que la marque aux diapasons place trois de ses pilotes en tête de la deuxième journée, aucun d'entres-eux ne s'est montré optimiste pour la course…
Le manque de vitesse de pointe de la M1 les inquiète, tout comme ses réactions quand l'adhérence vient à manquer : "quand le grip est excellent, comme en ce moment grâce au dépôt de gomme sur la trajectoire, nous sommes rapides au chrono mais c'est autre chose quand l'adhérence manque", admet Viñales.
Le nouveau châssis ne semble pas résoudre ses soucis récurrents, pas plus d'ailleurs qu'il permette à Rossi de retrouver une position digne de son palmarès : le pilote italien s'est montré en grandes difficultés lors de la reprise, avant de laborieusement remonter à la 8ème place au classement combiné à 8 dixièmes de retard sur le leader.
Pas de quoi pavoiser pour le nouveau pilote Petronas-SRT, surtout que son protégé Franco Morbidelli s'est à l'inverse hissé dans le haut du tableau avec une Yamaha de génération antérieure....
A noter également la belle progression du clan Aprilia, qui s'est fréquemment invité aux avant-postes pendant ces journées avec Aleix Espargaro. La RS-GP - de nouveau totalement repensée - paraît prometteuse, mais gare aux mirages dans le désert : l'Aprilia avait aussi impressionné l'an dernier pendant l'intersaison, sans concrétiser en course.
L'équipe championne du monde Suzuki a pour sa part bouclé un programme de tests surtout axé sur de petites évolutions, ce qui paraît logique au regard du niveau d'homogénéité atteint par la GSX-RR l'an dernier : Joan Mir ne sera pas en terrain inconnu pour défendre son titre !
Chez Honda, la RCV a semble-t-il beaucoup évolué en matière électronique et de partie-cycle, avec notamment l'intégration d'un blocage mécanique de suspension à l'avant en plus de l'arrière pour favoriser les départs. Ce "holeshot device" désormais commun en MotoGP est aussi activé par les pilotes en ligne droite aux bénéfices de la v-max : voila pourquoi les Ducati et les Honda sont tassées au ras du sol en ligne droite !
Le HRC s'est aussi acclimaté à sa nouvelle recrue Pol Espargaro, qui quitte le Qatar avec le 10ème meilleur chrono au combiné en 1'53.899 à égalité avec Johann Zarco ! Entrée en matière réussie, donc, pour le transfuge KTM, qui doit également apprécier de prendre ses marques dans sa nouvelle équipe sans son "taulier", Marc Marquez !
Celui-ci vient justement de recevoir par les médecins l'autorisation de reprendre un "entraînement intensif", soit une vraie avancée positive depuis sa fracture du bras droit contractée le… 19 juillet lors de la première course à Jerez (Espagne). Avec à la clé une saison totalement blanche et beaucoup de complications médicales...
Honda, qui a inscrit Marquez au GP du Qatar, n'annonce encore aucune date de retour sur la RCV pour son pilote vedette : l'espagnol - échaudé par les conséquences de son retour précipité l'été dernier- va déjà jauger sa condition physique sur une petite cylindrée avant de reprendre le guidon de son prototype de presque 300 ch. Qui l'en blâmera ?
Enfin, KTM paraît en fâcheuse posture à l'issue de ces tests au Qatar : il faut descendre au 16ème rang au combiné pour trouver la première RC16, celle du nouveau pilote officiel Miguel Oliveira. Son coéquipier Brad Binder le suit à la 17ème place, en évoquant "un mur" auquel se heurteraient tous les pilotes de la marque Orange à Losail en matière de développement.
Le sud-africain relativise cependant en rappelant que les KTM n'ont jamais particulièrement brillé au Qatar, circuit qui demande une vitesse en courbe qui fait encore défaut aux prototypes autrichiens. A vérifier sur d'autres tracés plus favorables à la RC16 : à suivre, restez connectés !
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