Parmi les six favoris pour le titre MotoGP 2020, l'actuel leader Joan Mir est le seul à ne pas s'être encore imposé à trois courses de la fin de cette drôle de saison. Le pilote Suzuki deviendra-t-il le premier pilote à décrocher le plus convoité des titres moto sans aucune victoire en catégorie reine ? Décryptage.
Étonnante, palpitante, surprenante : la saison MotoGP 2020 ne manque pas de piquant entre le coronavirus et l'absence de Marc Marquez, "patron" de la catégorie depuis 2013 ! Le champion en titre est au tapis depuis l'ouverture à Jerez (Espagne) et poursuit la rééducation de son bras alors que se profile l'antépénultième manche ce week-end à Valence (Espagne).
L'heure de dresser le bilan de cette campagne uniquement disputée en Europe - Covid-19 oblige - approche, tout comme le sacre du nouveau porteur de la couronne. A ce stade, une chose est certaine : le champion du monde 2020 sera titré pour la toute première fois en catégorie reine !
Hormis Marquez, le seul déjà couronné en MotoGP est Valentino Rossi qui est forfait depuis deux courses car porteur du coronavirus. Or l'italien - qui espère reprendre le guidon vendredi - est 15ème à 79 points du leader alors qu'il n'en reste que 75 à distribuer : le n°46 est officiellement hors course pour le titre, victime aussi - et surtout - de ses trois chutes consécutives à Misano (Italie), Barcelone (Espagne) et au Mans (72).
Les 14 pilotes (!) qui le précèdent sont encore mathématiquement en lice, même si leurs chances sont minces dans la deuxième partie de ce classement : Johann Zarco, 14ème avec 73 pts de retard, peut difficilement prétendre viser la couronne. Quoique : le cannois ne vient-il pas de signer le meilleur résultat Ducati avec sa 5ème place en Aragon (Espagne) ?!
L'attribution de la consécration suprême se joue - sauf surprise - entre six pilotes, dans l'ordre du classement provisoire : Joan Mir (137 pts), Fabio Quartararo (123 pts), Maverick Viñales (118 pts), Franco Morbidelli (112 pts), Andrea Dovizioso (109 pts) et Alex Rins (105 pts). Soit deux Suzuki, trois Yamaha et une Ducati.
Trois points sautent aux yeux à la lecture de ce classement : l'écart diablement serré de seulement 32 points entre le premier et le sixième, par ailleurs coéquipiers chez Suzuki. Du rarement vu à ce stade de la saison ! Cet aspect s'explique par un deuxième constat moins flatteur : la faiblesse des soldes de points.
Si Joan Mir remportait les trois dernières courses, le majorquin serait titré avec 212 points : à comparer aux 420 (!) inscrits l'an passé par Marc Marquez ! Ce faible nombre de points s'explique par l'absence de réels meneurs et l'hétérogénéité du plateau : où sont par exemple passés les Brad Binder et Miguel Oliveira, vainqueurs surprises en République tchèque puis en Autriche sur leurs (sur)puissantes KTM ?
Outre ces coups d'éclats sans lendemain, les favoris logiques comme Maverick Viñales et Andrea Dovizioso ne sont que l'ombre d'eux-mêmes, tandis que Valentino Rossi a laissé filé sa - dernière ? - chance. Aussi incompréhensible que frustrant, alors que l'absence de Marquez leur ouvrait pourtant la voie royale. Doit bien se marrer, le n°93 !
Quant à Fabio Quartararo, ses trois victoires et ses 4 pole sont certes enthousiasmantes, mais ses difficultés à maintenir sa vitesse interpelle... 18ème puis 8ème en Aragon, Fabio est également passé à côté en République tchèque, en Autriche et en France. Sans oublier sa chute au GP de San Marin, ainsi que ses pépins comme la mauvaise pression dans son pneu en Aragon. Et, peut-être, la pression "tout court" dans son casque ?
Troisième et dernier point notable qui se dégage du classement provisoire : son actuel leader, Joan Mir, ne compte aucune succès en MotoGP. Le jeune pilote Suzuki (23 ans) est en réalité le seul non victorieux parmi les six pilotes en lice pour le titre : Fabio compte trois succès, Viñales, Dovizioso et Rins ont chacun remporté une course, tandis que Morbidelli s'est imposé à deux reprises.
Sans manquer de respect à ces génies du pilotage, ce constat traduit là encore l'absence de véritables leaders et d'une opposition puissante et régulière. Si d'aventure Joan Mir venait à remporter le titre sans ouvrir son compteur de victoire, ce serait une première dans la catégorie reine depuis sa création en 1949 !
Dans toute l'histoire des 500 cc/MotoGP, les pilotes titrés ont au minimum remporté deux courses : qu'il s'agisse de Leslie Graham en 1949, d'Umberto Masetti en 1950 et 1952 ou encore de Nicky Hayden en 2006. Le dernier sacre remporté sans victoire est celui d'Émilio Alzamora en 1999 dans la catégorie 125 cc face à Marco Melandri (5 succès pour l'italien... mais 4 résultats blancs !).
Peut-on pour autant déconsidérer la performance de Joan Mir ? Certainement pas ! D'une part, car rien ne nous y autorise : allez donc tordre une MotoGP de presque 300 ch pendant 25 tours, en répétant les mêmes chronos au dixième près ! Le tout dans cette ambiance pour le moins stressante de cette période Covid...
D'autre part, Joan Mir n'occupe pas la première place sans raison : le pilote Suzuki possède une qualité trop rarement aperçue cette saison, la régularité. Sur les six dernières courses, Mir est monté sur le podium à cinq reprises alors que ses rivaux ont tous commis au moins un faux-pas. Joan, lui, garde sa ligne (de mire, forcément !).
Hormis ses résultats blancs lors de la course d'ouverture puis en République tchèque, son bilan est impeccable : sa 11ème place au Mans constitue à ce jour son plus mauvais résultat, tandis que la victoire est passée tout près à Misano (Italie) et à Barcelone (Espagne).
Franchement flatteur pour le champion du monde Moto3 2017, qui par ailleurs ne cumule que cinq saisons et 83 Grands Prix en championnat du monde ! A comparer là aussi avec l'expérience de "vieux briscards" comme Rossi (17 ans plus vieux !), Dovizioso, Viñales ou encore Rins, le coéquipier de Mir qui pilote la Suzuki depuis 2017.
Enfin, comme le souligne Émilio Alzamora, l'histoire retient surtout le nom des champions du monde : "au final les gens se rappellent du mondial, et l’objectif du pilote est d’être champion du monde. Parfois les circonstances font qu’on ne gagne pas un GP, comme ça m’est arrivé, mais je ne crois pas que cela enlève du mérite", (se r)assure l'ancien piliote espanol, aujourd'hui manager des frères Marquez !
Redoutable finisseur, rapide et fin stratège, Joan Mir ne manque que d'un peu plus de réussite en qualifications : le n°36 est plus convaincant avec des pneus usés en fin de course qu'avec des "balles neuves" en qualifs ! D'où ses départs depuis la deuxième ou troisième ligne, synonymes d'efforts supplémentaires pour remonter sur les hommes de tête.
Le voir remporter une course n'est donc qu'une question de temps, d'autant que la GSX-RR fait désormais référence en MotoGP en matière d'homogénéité. La Suzuki est rapide sur tous les circuits, sur bitume chaud ou frais. Or Ducati, Honda et Yamaha ne peuvent en dire autant.
Trois chances s'offrent encore à Joan Mir pour concrétiser : les Grand Prix d'Europe et de Valence qui se suivent à partir de ce week-end sur le Ricardo Tormo, puis la finale le 22 novembre sur le tracé de Portimao où les MotoGP disputeront leur première course.
"Gagner le championnat est plus important que de gagner une course", estime Joan Mir. "Je profiterai de l’opportunité de gagner si elle se présente, mais s’il faut faire des folies, mieux vaut peut-être s'abstenir : nous sommes tous très proches au championnat et un "zéro" peut grandement nous pénaliser".
Quoiqu'il soit, victoire ou pas, une opportunité en or s'offre à Mir et à Suzuki, dont le dernier titre en catégorie reine remonte à 2000 et Kenny Roberts (juste avant qu'un certain Valentino Rossi ne prenne le monopole). Quelle meilleure façon pour Suzuki de célébrer ses 60 ans d'engagement en Grands Prix moto ?!
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Plateau : Les pilotes et leurs motos 2024
10 mars : GP du Qatar
24 mars : GP du Portugal
07 avril : GP d'Argentine (annulé)
14 avril : GP des Amériques
28 avril : GP d'Espagne
12 mai : GP de France
26 mai : GP de Catalogne
02 juin : GP d'Italie
16 juin : GP du Kazakhstan (reporté)
30 juin : GP des Pays-Bas
07 juillet : GP d'Allemagne
04 août : GP de Grande-Bretagne
18 août : GP d'Autriche
01 septembre : GP d'Aragon
08 septembre : GP de San-Marin
22 septembre : GP d'Inde (annulé)
22 septembre : GP Kazakhstan (annulé !)
22 septembre : GP d'Emilie-Romagne
29 septembre : GP d'Indonésie
06 octobre : GP du Japon
20 octobre : GP d'Australie
27 octobre : GP de Thaïlande
03 novembre : GP de Malaisie
17 novembre : GP de la "Solidarité"
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