À quelques jours des derniers tests WSBK et une semaine de l'ouverture du 29ème championnat du monde Superbike, Sylvain Barrier fait le point pour Moto-Net.Com sur sa préparation et livre son avis - tranché ! - sur le nouveau format de courses. Interview.
Après les pilotes MotoGP, ceux du World Superbike ont rendez-vous à l'autre bout du monde, en Australie, pour participer lundi et mardi aux derniers essais hivernaux. Et c'est dès le week-end prochain, sur cette même piste de Phillip Island, que débutera le championnat WSBK 2016, à suivre toute l'année en détail sur MNC !
Contacté par Moto-Net.Com, Sylvain Barrier a eu la gentillesse - le professionnalisme et le courage - de répondre à nos questions. Le n°20 du team Kawasaki Pedercini fait le point...
Moto-Net.Com : Bonjour Sylvain ! Tout d'abord, comment vas-tu ?
Sylvain Barrier : Ça va très bien, merci ! Je suis déjà à Phillip Island car lundi et mardi nous avons les derniers tests avant l'ouverture du championnat le week-end suivant.
MNC : Tu as connu une année 2015 éprouvante (séparation avec BMW après deux épreuves WSBK, puis blessure à l'épaule qui te gâche tes saisons STK1000 et CIV sur la Yamaha)... Tu as quand même pu te faire plaisir et apprendre ?
S. B. : Oui, c'est vrai que 2015 à été une année vraiment très, très difficile, que ce soit mentalement ou physiquement. Je n'ai pas vraiment pu "apprendre", non, en revanche j'ai pu me rendre compte par moi-même que la Yamaha R1 est une très bonne moto. Et ce que j'ai pu découvrir aussi, c'est que même en ayant des tendons et des muscles arrachés, le corps compense énormément.
MNC : Tu as aussi bossé pour Michelin l'an dernier. Que faisais-tu exactement ?
S. B. :J'étais pilote de développement pour les gammes Hypersport et Moto GP "Compétition" .
MNC : Qu'as-tu retenu de ce travail ?
S. B. : J'ai retenu énormément de choses sur les pneumatiques bien évidemment, mais j'ai surtout noté que Michelin est une grande famille et qu'ils sont toujours là même quand ça ne va pas. J'ai appris à analyser les sensations qu'on a quand on pilote une moto, et à les décrire avec clarté en utilisant un vocabulaire "technique" bien précis. Il faut aussi être très régulier et constant pendant les roulages, le tout en gardant une bonne vitesse pour solliciter au maximum les pneus.
MNC : Heureusement, la saison 2016 s'annonce mieux pour toi ! Que penses-tu de ta nouvelle Kawasaki ?
S. B. : Le premier feeling avec la moto a été très bon. Maintenant, je reste quand même aux aguets. Je n'ai surtout pas envie de me faire de faux espoirs et au final, reperdre toute l'énergie que j'ai fournie pour revenir où je suis maintenant. C'est vraiment très dur mentalement. Par contre, je reste convaincu qu'avec le team et la moto, nous pourrons faire de très belles courses.
MNC : Quelles sont les différences entre le 4-cylindres BMW, le Crossplane Yamaha et le 4-cylindres Kawasaki ?
S. B. : Il y a une grande histoire entre la BMW et moi. Je la connaissais sur les bouts des doigts car la S1000RR a été ma moto durant cinq saisons consécutives. C'est une machine qui possède beaucoup de caractère et je devais être ferme avec elle pour pouvoir l'emmener ou je voulais. Côté moteur, elle était très agressive. La R1, c'était tout le contraire ! Son moteur était plus doux que tout ce que j'avais roulé auparavant et sa partie cycle était très facile. La ZX-10R, côté châssis, est souple et en même temps précise. Tu sens que l'électronique est vraiment au point et qu'ils ont beaucoup travaillé depuis des années avec ce système. Pour le moment, j'ai roulé avec les moteurs de 2015 alors je ne peux pas encore dire ce que les moteurs 2016 valent.
MNC : Selon toi, qu'est ce qui détermine le plus le succès d'un pilote entre sa machine, son équipe, sa motivation, l'implication du constructeur, le soutien de ses proches et l'appui de ses sponsors ?
S. B. : Dans l'ordre je dirais l'équipe, le constructeur et la moto. La motivation arrive avec, automatiquement. Les proches sont toujours avec toi et ensuite, c'est une spirale positive qui se met en place. Les résultats viennent tout seul et les sponsors arrivent pour te soutenir davantage.
MNC : Tu as signé le 15ème chrono des derniers essais hivernaux. Est-ce que cette position correspond à ton rang actuel ?
S. B. : Non, pas du tout. C'est juste qu'aux tests de Jerez, j'avais encore le châssis d'origine. Et on n'a pu boucler que 40 tours en deux jours à cause de problèmes électroniques. Pour te dire à quel point : à un moment donné, la poignée d'accélérateur est resté bloqué à 40% ! Sur le moment, je t'assure que tu ne fais vraiment pas le malin... Tu te chies dessus, même ! Du coup, pour moi les résultats de ce test ne veulent rien dire.
MNC : Que penses-tu du 9ème chrono du champion du monde 2015, Jonathan Rea?
S. B. : C'est déjà une très bonne performance. Le monde de la moto est un milieu très difficile. Tous ceux qui ont fini au-delà de la neuvième place ne sont quasiment plus en catégorie SBK aujourd'hui. Il y a vraiment un gros manque de sponsors, y compris pour moi : cette année je suis obligé de payer pour pouvoir rouler.
MNC : Rea a largement dominé la saison dernière. Qu'est-ce qui le rend si fort ?
S. B. : Comme on l'a dit précédemment, l'équipe, la moto, le constructeur, sa famille et ses sponsors.
MNC : En fin de saison toutefois, c'est Chaz Davies qui a marqué plus de points. Est-il le véritable favori pour 2016 ?
S. B. : Oui, c'est sûr qu'il va être là cette année. Mais il y en aura d'autres avec lui !
MNC : "JR" nous a confié récemment qu'avant même la fin de son tout premier tour au guidon de la ZX-10R à Aragon en novembre 2014, il savait qu'il pourrait se battre pour le titre. D'après toi, il se la raconte un peu ou pas du tout ?
S. B. : Non, je ne pense pas. C'est juste que quand le feeling passe entre la moto, le pilote et l'équipe, rien ne peut les arrêter.
MNC : Et toi, qu'as-tu ressenti en bouclant ton premier tour aux commandes de la Ninja ? Qu'en as-tu conclu ?
S. B. : J'ai réalisé que cette moto était vraiment au point et qu'il y avait eu beaucoup de travail de fait dessus, surtout sur l'électronique. Même si je me suis frotté un peu les mains en me disant que je pouvais faire une excellente année, je reste attentif à ne pas prendre une claque dans la gueule. Je pourrais avoir du mal à m'en relever.
MNC : Qu'espères-tu pour 2016 ?
S. B. : J'espère déjà retrouver du plaisir à rouler avec une bonne moto. Après, les résultats viendront tout seuls.
MNC : Te reste-t-il beaucoup de travail à abattre pendant ces derniers tests officiels en Australie ?
S. B. : Énormément ! Il aurait fallu encore deux sessions de deux jours pour être vraiment au point, ou plutôt pour être sereins, surtout avec tous les petits problèmes que l'on a pu rencontrer cet hiver.
MNC : Tu seras quand même fin prêt pour la première course australienne ?
S. B. : Non, loin de là ! Pour moi, on sera prêts à Aragon, et encore...
MNC : À partir de cette année, les premières manches se dérouleront le samedi, après la Superpole. Qu'en penses-tu ?
S. B. : Pour moi c'est une connerie, parce que ça me mange tout le week-end. Le vendredi, il y a deux fois une heure et si tu tombes une seule fois, ton week-end est râpé car le samedi il y a 15 minutes qui ne comptent pas pour la qualification, puis les deux phases de Superpole. C'est donc mort pour finir de peaufiner tes réglages car tout de suite après, il y a la première course ! Le dimanche, c'est le warm-up de 15 minutes et la deuxième course. Personnellement, je préférais quand il y avait deux courses le dimanche, tu arrivais à faire un peu la différence côté physique.
MNC : Cela donne plus de temps aux mécanos pour peaufiner les réglages... ou rebâtir la moto après une éventuelle chute !
S. B. : Non, tu peaufines rien du tout. Et pour les chutes, il suffisait d'autoriser deux motos complètes par pilote pour balayer ce problème.
MNC : Les conditions météo pourront être très différentes. Ou au contraire plus proches, car les courses se dérouleront aux mêmes horaires et non plus tôt le matin puis l'après-midi. Est-ce mieux ?
S. B. : Au contraire, c'est ce qui différenciait "avant" le WSBK du Moto GP. Avec deux courses le dimanche, il pouvait se passer plein de choses différentes.
MNC : Autre nouveauté en 2016, les pilotes de Superstock 600 vont rejoindre ceux du Supersport sur les épreuves européennes. Est-ce un bon format ?
S. B. : Je pense que oui.
MNC : Penses-tu que les STK1000 pourraient - ou devraient - rouler avec vous ? Cela faciliterait l'accès aux wild cards, non ?
S. B. : À mon avis, les STK1000 peuvent facilement jouer entre la 17ème et la 12ème place. Ensuite, il y a toujours la dernière seconde qui coûte des millions de développement sur les motos. Rappelle-toi qu'ils avaient instauré il y a deux ans une catégorie Evo. Mais ça n'a pas duré.
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