L'association Assureurs Prévention et le groupement GEMA Prévention ont mené une enquête auprès des utilisateurs de deux et trois-roues motorisés en France au sujet de leur équipement. Conclusion : la route est encore longue...
Dans le monde merveilleux des deux - et trois ! - roues motorisés, les constructeurs construisent, les conducteurs conduisent, les équipementiers équipent, les pouvoirs publics légifèrent, les assureurs assurent... Et tous doivent oeuvrer pour que l'utilisation d'une moto ou d'un scooter ne soit plus considérée comme dangereuse !
Les assureurs qui enquêtent |
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En conviant la presse à leur conférence ce matin, les assureurs (lire l'encadré ci-contre) tenaient à prouver qu'ils remplissaient la seconde part de leur "contrat" : la prévention, "qui est notre second métier", insiste Patrick Jacquot, président de GEMA Prévention.
Selon lui, "les assureurs ne sont pas là que pour réparer". En effet, ceux-ci disposent d'une vue imprenable sur la sinistralité des deux et trois roues à moteur en France. Ils peuvent - doivent - donc établir des "constats" sur les moeurs des motards et scootéristes français, émettre des avis et conseils, entreprendre des actions...
"Or seule une étude juste permet d'engager des actions pertinentes", estime à juste titre Bernard Spitz (président d'Assureurs Prévention). L'enquête exclusive d'Assureurs Prévention et de GEMA Prévention vise précisément à rendre compte des habitudes des utilisateurs de moto et/ou scooter.
Le sujet du jour est l'équipement, et ce pour une raison bien simple : "cela peut paraître trivial", assume Patrick Jacquot, "mais il est toujours bon de le rappeler : la carrosserie du conducteur de deux ou trois-roues motorisés, c'est son équipement".
"Alors que le "corporel" intervient sur un accident sur dix en voiture, il est présent la moitié des cas chez les 2-3-RM", précise le président de GEMA Prévention. La gravité des dommages quant à elle est directement liée au niveau d'équipement.
Premier constat surprenant : 11% des utilisateurs interrogés déclarent ne pas toujours porter de casque, alors que cet élément est - le seul ! - obligatoire. "Il s'agit surtout de seniors qui utilisent un cyclo à la campagne, à qui il arrive d'aller faire une course sans casque", précise à Moto-Net.Com Bruno Jeanbart, directeur général adjoint d'Opinionway.
"Chez les autres catégories d'utilisateurs, les jeunes notamment, la bataille du port du casque est remportée", nous (r)assure le responsable de l'étude. Néanmoins, des efforts doivent encore être fournis vis-à-vis de la protection de la caboche...
Méthodologie d'étude |
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Actuellement, 19% des motards et scootéristes (à 3% près, lire l'encadré sur la méthodologie) portent toujours un casque intégral. D'après l'étude toujours, "ce taux passerait à 52% si la réglementation imposait le port obligatoire de l'intégral". mais parmi les 48% restants, combien défieraient la loi et combien stopperaient tout bonnement le deux-roues motorisés ?
En ce qui concerne le blouson cette fois, les assureurs observent d'une part que 46% des utilisateurs de 2-3-RM n'en portent pas toujours, et d'autre part que 51% des utilisateurs n'utilisent pas de blouson spécifiquement conçu pour la conduite de leur engin.
On retient également que parmi les "EPI" (Equipement de Protection Individuelle, lire notre Point MNC sur les normes des équipements moto et scooter), le pantalon est l'accessoire "moto" le moins considéré: 75 % des motards et scootéristes n'en portent pas, contre 50% pour les chaussures (renforcées et montantes) et 30% pour les gants.
Au sujet, toujours, des équipements renforcés - par des coques, du kevlar ou autre -, l'étude pointe du doigt les scootéristes, mais aussi et surtout deux catégories "traditionnellement prudentes" : les femmes et les "+ de 60 ans"...
D'après l'étude, 79% des "filles" et des "seniors" circulent sans pantalon spécifique aux deux-roues, soit 4% de plus que l'ensemble des utilisateurs. De même, 59% des "+ de 60 ans" et 56% des femmes se passent d'un "vrai" blouson (contre 51% pour la totalité des conducteurs de 2-3-RM).
La réglementation ne fait pas tout |
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"Certes, mais quelle nana venant d'acheter un 50 cc va oser entrer dans un Dafy (par exemple, NDLR) ?", réagit immédiatement Isabelle Lebret, membre actif de l'association "Toutes en moto"... "Elle achète un casque en même temps que son scooter, mais n'est pas toujours incitée à mieux s'équiper".
"Même lorsque la Mutuelle (un exemple ici aussi, NDLR !) joint au premier certificat d'assurance un carnet de bons de réduction, ceux-ci sont très axés motards", remarque Isabelle Lebret. Or cette pertinente remarque peut être étendue à d'autres catégories d'utilisateurs.
"Il s'agit d'un problème de culture et de formation", résume Patrick Jacquot. "C'est pourquoi nous, les assureurs, devons communiquer davantage, et notre discours doit être relayé par les médias grand public", uniques moyens d'atteindre les utilisateurs non passionnés - c'est un droit - et peu sensibilisés - c'est un fait !
Les scootéristes et les jeunes seraient les principales cibles de ces messages de prévention car ceux-ci gonflent trop certaines statistiques, notamment l'été : en tout, 57% des utilisateurs de 2-3-RM ne portent parfois qu'un simple tee-shirt pour conduire, 47% un short - ou une jupe ! - et 31% des chaussures ouvertes.
"Malheureusement, tous les "équipements" ne sont pas négligés !", remarque Assureurs Prévention et GEMA Prévention. En effet, 30% des utilisateurs portent des "casques" audio lorsqu'ils roulent sur leur deux-roues. Ils sont même 51% parmi les moins de 25 ans (!) et 38% parmi les Franciliens.
De même, il arrive à 15% des motards et scootéristes de téléphoner ou de consulter leur téléphone en conduisant. Or cette proportion grimpe à 23% chez les "- de 25 ans" et les Franciliens. Doit-on rappeler que le téléphone est interdit au volant comme au guidon ?!
Outre la période estivale, une autre "circonstance" vient accentuer la prise de risque : la longueur du trajet. Ainsi, "58% des motards et scootéristes français ne s'équipent pas de la même manière pour les trajets courts et les trajets longs", relèvent les assureurs (qui ne précisent pas les distances en km).
Pourtant, le bitume est tout aussi abrasif devant chez soi qu'à 200 km de là ! "Les gens oublient trop vite leurs expériences de gamins à vélo", regrette Patrick Jacquot. Certains motards et scootéristes n'ont pas retenu qu'en cas de chute leurs mains sont automatiquement exposées et que leurs genoux, hanches et chevilles peuvent être salement amochés, sans aller particulièrement vite (et toi quand t'avais cinq piges, tu roulais à quelle vitesse sur ton biclou ?).
Derrière leurs chauffeurs, les passagers semblent être encore moins conscient du danger : 64% d'entre eux ne mettent pas toujours de gants, 56% ne mettent pas toujours de blouson et 53% ne mettent pas toujours de pantalons. Or il s'agit dans ces statistiques de "vêtements de ville" et non "d'équipement moto" !
Plus inquiétant encore, les passagers sont deux fois plus nombreux que les conducteurs à ne pas toujours porter de casque (22%). Et cette fois-ci, cela ne concerne pas uniquement nos vénérables petits vieux perdus au milieu de la cambrousse !
Pourtant, la conduite des gugusses assis juste devant eux n'inspire pas confiance : 66% avouent dépasser les limites de vitesse, 53% montent sur les trottoirs (mais ne roulent pas forcément dessus pour remonter une rue... quoique), 24% ne respectent pas les règles de priorité, 20% prennent des sens interdits (on y est !) et 20% également prennent le guidon en ayant "un peu bu".
L'étude affirme en complément que les conducteurs chez qui ces pratiques sont les plus répandues habitent en Ile-de-France, ont déjà eu un accident et/ou ont moins d'un an de conduite. Amis passagers, vous voilà prévenus !
En conclusion, l'étude énumère trois "freins actuels à des pratiques plus sécuitaires". Le manque de confort tout d'abord, est évoqué par les motards et scootéristes qui ne portent pas de chaussures adaptées, de gants, de blouson, de pantalon ou de casque intégral.
Le coût est un autre facteur qu'il est nécessaire de prendre en compte afin d'inciter les utilisateurs de deux-roues à s'équiper de vraies bottes, d'un vrai blouson, d'un casque intégral... et d'un dispositif airbag ?! "Nous souhaitons mettre en place une vaste opération de sensibilisation sur les équipements moto et scooter via les concessionnaires", intervient Thierry Archambault, président délégué de la Chambre Syndicale Internationale de l'Automobile et du Motocycle (CSIAM).
Mieux, en collaboration avec les équipementiers, la CSIAM travaille actuellement à la création de "packs équipement" qui encourageront les utilisateurs de 2-3-RM à ne plus se contenter d'un simple casque jet pour rouler. Ces offres "tout compris" devront naturellement être financièrement attractives.
Enfin, le troisième et dernier frein cité par les assureurs relève du manque de connaissance - ou de bon sens ! - des utilisateurs qui ne portent pas d'équipements parce qu'ils les considèrent inutiles ! "Il suffit de comparer le bitume à une râpe à fromage pour faire réfléchir", observe Patrick Jacquot. À méditer.
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