Amandine Pasqualini, débutante en compétition, a posé pour la première fois ses roues en compétition lors de la finale des WERC au Vigeant... Compte rendu de son week-end de course à l'attention de ceux et celles qui souhaitent taquiner le chrono !
C'est lors de la finale des Week-End Racing Cup (WERC) sur le très apprécié circuit du Val-de-Vienne au Vigeant (86) que j'ai choisi de poser mes roues pour la première fois en compétition. Alors pour tous ceux (et celles !) qui souhaitent également se lancer à la poursuite du chrono, voici comment se déroule le week-end de course d'une débutante...
La compétition... Pour moi, c'est l'aboutissement de 30 000 km sur routes en deux ans, de dizaines de roulages entre amis sur quelques circuits français et l'envie d'évoluer dans la passion. J'ai donc choisi les WERC et plus particulièrement la Twin Cup, où les SV sont majoritaires.
Etudiante en CDI, mon budget moto correspond à une sympathique Suzuki SV 650N de 1999, qui m'accompagne depuis mon permis jusqu'à ce week-end. Ce projet a nécessité plusieurs mois de mis en oeuvre et bon nombre de galères... celles que connaissent tous les pilotes !
Car il ne faut pas se leurrer : la recherche de sponsors n'est déjà pas une mince affaire pour des pilotes professionnels, alors imaginez pour une débutante sans palmarès... Non sans mal, et grâce à des professionnels passionnés qui ont bien voulu me tendre la main, je parviens à boucler mon budget à temps.
Je m'apprête donc à rejoindre une équipe de pilotes performants et expérimentés : Jean-François Monti (vainqueur de la Twin Cup 2008), Vincent Benazzi (2ème de la Twin Cup 2009 malgré son absence pour blessure), Léo Pietri (jeune challenger en TC) et Don Charles Angelini (remplaçant au pied levé de Vincent).
Le tout avec l'encadrement et l'assistance de Raphael "le Sorcier" Bonifay, qui met à notre disposition sa structure du 2RTeam Compétition, digne des grands pilotes d'usines !
Jeudi soir, après 8 heures de trajet depuis Toulon, j'arrive enfin sur le circuit... Et la boule au ventre qui me sert de copine depuis un mois se fait encore plus présente ! Au moment de décharger la moto, quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Mauvais présage pour les essais de demain qui sont censés me permettre de découvrir ce nouveau tracé...
Boule au ventre...
La moto à peine déchargée, Raph la passe au peigne fin : il ne rate rien, elle n'est pas tout à fait au point ni conforme au règlement mais il ne tarde pas à y remédier. J'en profite pour aller saluer le staff du camion Motors Events et me débarrasser de la paperasse (licence, horaires définitifs, etc.). Vendredi matin, ce sont encore ces maudites gouttes de pluie qui me réveillent : un vrai déluge ! Je choisis de laisser passer les essais de la matinée car le budget pneus n'est pas extensible aux intempéries ! La météo prévoit du beau temps pour l'après midi... Bingo ! A midi la pluie cesse et pendant que le vent sèche la piste, je présente ma moto au contrôle avant de découvrir l'arène...
Je me lance donc pour mes tout premiers tours de roue vers 14h00. La piste est très belle et confirme la réputation de ce fameux circuit dont la complexité annonce une mémorisation fastidieuse. J'y vais prudemment, rien de pire que de casser la machine la veille de la course !
Mon ami Maxime Guerbette m'accompagne sur une séance et m'ouvre la piste. Il me prouve par A+B que je peux mettre plus de gaz dans des virages qui ne m‘inspiraient pas de prime abord et me montre quelques trajectoires que je ne maîtrisais pas.
Le chrono s'améliore !
Durant les essais, le chrono s'améliore en passant de 2'20 à 2'12. Certes, je reste très loin de mes concurrents, mais je le vis bien car le but n'est pas dépasser les autres mais le dépassement de soi. Et jusqu'ici, mission accomplie !
Je sens une évolution digne des meilleurs stages et en fin de journée, le stress de la découverte s'est envolé ! Après le briefing obligatoire rappelant les règles élémentaires de la course et le très attendu punch de Marc Mothré, Johan Denaud - que j'appelle "l'infirmier" en raison de sa tenue blanche et de sa rapidité - nous invite à sa table. L'occasion de mieux connaître les acteurs du championnat et leurs proches, car l'ambiance des WERC est propice à la bonne humeur, aux grandes tablées à la bonne franquette !
Le Sorcier ne nous rejoint que bien plus tard : pour lui, pas question de s'asseoir tant que toutes les bécanes ne sont pas prêtes à rouler ! Non pas qu'elles soient en piteux état, mais il n'a pas pour habitude de faire dans l'à peu près pour la préparation des machines ! Et j'avoue que c'est un vrai luxe de pouvoir démarrer en compétition dans de si bonnes conditions, en sachant que sa moto est entre de bonnes mains : c'est toujours un souci de moins à gérer !
Enfin le Jour J !
Samedi... C'est enfin le jour J ! Dans quelques heures, je vais prendre mon premier départ en course de vitesse ! Une grille, un feu et la tension palpable d'un parterre de pilotes qui guettent son changement de couleur... Rien que de visualiser ça dans ma tête, mon estomac se noue dès le réveil !
Mais pour l'instant il n'est que 8h du mat', deux essais qualifs sont encore à faire et je n‘ai toujours pas bu mon sacro-saint café! Un café plus tard, donc, et avec mon équipement sur le dos, je repars à la poursuite du chrono... Décevante, car le chrono ne bouge pas : il est fixé à 2 minutes et 12 (maudites) secondes...
Je rentre au camion avec la feuille qui témoigne de ses résultats. Raph l'examine et m'assure que mon cas n'est pas tout fait désespéré, puisque nous sommes quatre pilotes à tenir dans la même seconde : "tu vas pouvoir te bastonner !"
J'examine les temps de plus près et en effet, ça promet une lutte sans pitié pour sauver l'honneur et ne pas finir dernière ! Le déjeuner passe un peu mieux que ce matin, car je me souviens que je suis une compétitrice et que le combat se joue à tous les niveaux, du podium jusqu'au fond du classement... autrement dit sur ma ligne.
"Les pilotes de la Twin Cup sont attendus en pré grille"...
À 20 minutes de la course le micro grésille : "les pilotes de la Twin Cup sont attendus en pré grille"... A cette annonce du speaker je finis rapidement de me préparer, je saute sur ma bécane et pars réaliser mon rêve...
Il ne s'agit plus ni de balade sur route, ni de roulage sur circuit : ici il faut donner, tout donner ! Le tour de formation et celui de chauffe me mettent rapidement dans le bain.
Et le moment tant redouté arrive : le départ ! Exercice périlleux : il ne faut ni caler, ni faire de roue avant ! Le feu change de couleur et je m'élance en bonne dernière. Devant moi, le premier virage est le théâtre d'une guerre des nerfs : c'est à celui qui freinera le plus tard !
En ne voulant pas me mêler à cette baston, je me retrouve derrière un pilote moins rapide qui laisse filer le peloton. C'est seulement au niveau du virage dit "trop vite" que je peux lui faire l'intérieur. Je me retrouve alos derrière Daniel Ruelle (n°18), celui qui affichait les mêmes chronos que moi lors des essais. Mais là, la différence est flagrante...
Je tente de m'accrocher mais mes freinages sont prématurés par rapport aux siens et il me tient à distance raisonnable pendant la moitié de la course... Jusqu'au moment - pénible ! - où les pilotes qui jouent la gagne nous rattrapent !
Johann Macé et Johann Denaud, en tête, prennent toutes les précautions pour me dépasser, car il n'est pas rare que cette situation engendre des accrochages. Mon concurrent le plus direct se fait doubler à son tour, mais il parvient à s'accrocher aux hommes de tête et augmente le rythme ! Impossible pour moi de rester à son contact : dans le dernier tour, il me largue littéralement et disparaît à 20 secondes...
Une avalanche d'émotions
Je passe sous le drapeau à damier et toute la pression retombe. Il me reste le sentiment d'avoir gagné mon pari et une avalanche d‘émotions... et disons que c'est le fait de relever ma visière m'a fait pleurer les yeux...
Je sais par avance que mes résultats ne sont pas brillants, mais je suis contente d'avoir fait et surtout fini ma première course ! En rentrant au barnum, loin de toutes les attentions portées sur le podium, je constate que l'évolution du chrono est flagrante : je passe d'un 2'12 en essais à un 2'06 en course ! Un gain précieux de six secondes qui m'a permit de finir 3ème... en partant de la fin !
J‘ai donc eu raison de croire que j‘avais ma place ici. Après le tumulte de la course, c'est le relâchement général : il s'agit maintenant de préparer la course d'endurance du lendemain matin et de s'assurer que le stock de carburant sera suffisant. Mais c'est aussi le temps de retrouver mes compagnons de piste autour d'un verre bien mérité. Chacun y va de son petit commentaire sur ses performances... étrangement comparable à celles de Valentino Rossi ! C'est le grand déballage d'exploits sur piste et même si chacun garde à l'esprit qu'il est là pour vivre sa passion à fond, personne ne dort à côté du téléphone en attendant un appel pour le prochain GP ! Pour moi la soirée s'achève vite, car cette journée chargée en émotions m'a mise KO. Et là, c‘est Morphée qui me fait les freins !
Dimanche à 10h, c'est le dernier départ pour la course d'endurance d'une heure qui clôture ce week-end en beauté, avant de rentrer à Toulon sur les rotules mais avec le sourire aux lèvres.
Profiter de chaque bout droit pour relâcher la tension
Je suis un peu plus sereine que pour la course de vitesse et pressée de retrouver le n°18 pour croiser le fer ! Le départ se passe mieux et je me mets immédiatement dans sa roue. Je le suis pendant quelques tours mais il n'est pas dans le bain, ses trajectoires ont changé et sa vitesse est plus réduite.
Juste après le redoutable virolo du "trop tard", il s'écarte après le point de corde : assez pour que je le dépasse ! Maintenant, il va falloir rester devant et au quart de la course, ce n'est pas une mince affaire !
Le rythme est élevé. J'essaye de mettre en application les bons conseils de Raph : "profiter de chaque bout de droit pour relâcher la tension dans les bras et ventiler à fond". Mais au virage du Buisson, le temps se gâte pour moi : je prend la corde trop tard, je me retrouve en catastrophe pour remettre les gaz et le n°18 en profite pour me dépasser ! Le scénario de ce coude à coude se reproduit jusqu'au ravitaillement où je perds de vue mon adversaire et je finis ma course en liquidant le peu d'énergie qu'il me reste.
A l'arrivée, pas le temps de souffler : il faut remballer toute la structure du 2RTeam ! A peine le temps de casser la croûte et de saluer mes comparses, et on reprend la route : 8 heures de trajet pour calmer mes crampes aux joues à force d'avoir le sourire !
Donc si l'idée de vous mettre à la compétition vous effleure, ne vous laissez pas démonter par les mauvaises langues et les embûches ! Laissez-vous du temps pour préparer la machine et le pilote, tout en mémorisant ce conseil que j'ai reçu : "tu trouveras toujours un pilote avec qui arsouiller !"
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