Dans un rapport qui devait rester confidentiel jusqu'au 6 février, le Conseil des Ponts et Chaussées préconise l'instauration d'un contrôle technique moto. Et pour mieux faire passer la pilule, propose de lâcher du lest sur le bridage à 100 chevaux...
Le rapport du Conseil des Ponts et Chaussées préconisant l'instauration d'un contrôle technique pour les motos et les cyclos, sur lequel s'appuie la délégué interministérielle à la sécurité routière pour présenter une proposition en ce sens lors du prochain Comité interministériel de sécurité routière (lire Moto-Net.Com du 10 janvier 2007), n'aurait dû être rendu public que le 6 février.
"Ce rapport ayant été réalisé avec l'objectif de préparer une éventuelle décision du gouvernement, je pense préférable, à ce stade, de ne pas le rendre communicable", précise en introduction Claude Martinand, vice-président du Conseil général des Ponts et Chaussées.
"Comme toute initiative nouvelle dans le secteur des deux-roues, il est à craindre qu'une telle décision suscite une réaction d'hostilité", prévoit le Conseil général des Ponts et Chaussées, citant les exemples de "la Belgique qui a dû repousser un tel projet pour ce motif et de la France qui a dû reculer sur l'allumage des feux de jour". Le rapport met donc en garde le gouvernement sur le fait que la décision d'instaurer un contrôle technique moto "ne peut être prise que dans un contexte politique favorable et à la suite d'une concertation préalable élargie à d'autres propositions susceptibles d'améliorer la sécurité des deux-roues".
La lecture de ce très intéressant rapport de 50 pages élaboré par l'ingénieur général de l'équipement Dominique Lebrun, rendue possible grâce à sa publication sur le site de l'Organisme technique central (OTC) auprès de l'Union technique de l'automobile, du motocycle et du cycle (UTAC), s'avère passionnante à plusieurs égards.
Outre un exposé impartial des positions de chacun des acteurs sur l'opportunité d'un contrôle technique moto (assureurs, associations, chambre syndicale, etc.), on y "apprend" notamment que la loi des 100 chevaux, spécificité française "qui suscite beaucoup d'interrogations et de critiques de la part des acteurs rencontrés", n'a "pas permis de mettre en évidence l'intérêt de la mesure en terme de sécurité" et que "le bilan des accidents de motos n'est pas meilleur, loin s'en faut, que dans les pays qui ne l'appliquent pas", comme l'Allemagne.
Le Conseil général des Ponts et Chaussées suggère donc au ministère des transports, commanditaire du rapport, de "s'interroger sur l'utilité du bridage à 100 ch pour les motos".
"Sans négliger le discours contradictoire et la difficulté de trouver une communication cohérente entre ce retrait de la limitation à 100 ch et les actions menées pour réduire la vitesse des véhicules à la construction, il nous semble que la situation actuelle n'est pas durablement défendable auprès d'une très grande majorité de motards qui demandent qu'on les traite en citoyens responsables. Au moment où ils auront le sentiment qu'on leur impose une nouvelle contrainte avec le contrôle technique, un geste de bon sens serait utile et apprécié", indique le Conseil général des Ponts et Chaussées après avoir noté que la technique du débridage étant "rudimentaire", les utilisateurs peuvent "facilement s'en affranchir".
"Le seul moyen efficace pour réduire la vitesse serait d'obtenir des constructeurs des systèmes anti-débridage efficaces ou une limitation par construction, qui nécessite une réglementation commune au monde entier, difficile à envisager dans des délais raisonnables", explique M. Lebrun, visiblement bien conscient que "les vrais facteurs de risque, bien connus chez les motards, reposent sur le comportement et l'utilisation non réfléchie qui est faite des performances des engins, aussi bien en termes d'accélération que de vitesse. Or ce comportement se manifeste dans la conduite d'engins de puissance bien inférieure à la limite arbitraire de 100 ch. S'il fallait vraiment fixer un seuil, il serait plus pertinent de l'exprimer en termes de poids/puissance".
Pour mieux faire passer la pilule du contrôle technique, qui pourrait être adopté lors du prochain Comité interministériel de sécurité routière en février, le gouvernement se montrera-t-il prêt à lâcher du lest sur le bridage à 100 chevaux ? Rien n'est moins sûr... Ca comme le note le rapport, il sera "difficile de trouver une communication cohérente entre ce retrait de la limitation à 100 ch et les actions menées pour réduire la vitesse des véhicules à la construction"...
En attendant, "bien que le lien de causalité entre accidentologie et état du parc ne soit pas clairement établi, elle (la mission du Conseil général des Ponts et Chaussées, NDLR) considère que des véhicules dont les fonctions de sécurité sont en bon état, parce que bien entretenues, sont nécessairement moins accidentogènes".
"Dans un souci d'apaisement, et avec la volonté de chercher à privilégier l'égalité de traitement avec les autres modes de transport", le contrôle technique moto recommandé par le Conseil général des ponts et chaussées "devrait porter sur l'ensemble du parc et être mis en oeuvre en même temps que la généralisation de l'immatriculation (donc en juillet 2009, NDLR, lire Moto-Net.Com du 10 janvier 2007)".
Il devrait également "obéir aux mêmes règles d'organisation que celles prévues pour les véhicules de tourisme, et en particulier selon la même périodicité (après quatre ans puis tous les deux ans, NDLR), privilégier un contrôle visuel et se limiter aux fonctions essentielles (dispositif de freinage, géométrie, débridage, contrôle du bruit, état des pneus, éclairage...) en réduisant les investissements nécessaires à quelques appareils pour ne pas alourdir le coût de la visite qui ne devrait pas dépasser 30 euros".
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