Quand il n'est pas appelé en urgence pour voler au secours de la veuve et de l'orphelin, Batman aime cruiser dans les rues de Gotham City au guidon de sa Honda DN-01... Parti châtier le Joker, il a eu la gentillesse de nous la confier une semaine. Essai !
Présenté en tant que concept au Salon de Tokyo en 2005, le premier prototype de Honda DN-01 fut accueilli avec circonspection par le public, étonné par ces lignes ultra futuristes et dérouté par la définition de l'engin...
Le premier constructeur mondial n'a en effet pas hésité à mélanger les genres en définissant sa DN-01 comme un "Automatic Sports Cruiser Concept"... On nous promet donc l'automatisme d'un scooter, la tenue de route d'une sportive et l'agrément d'un cruiser ? A boire et à manger !
Aussi, quelle ne fut pas notre surprise lorsque Honda nous a confirmé à Tokyo la sortie pour le printemps 2008 de sa DN-01 (lire Moto-Net.Com du 25 octobre 2007), à peine modifiée par rapport au prototype...
L'automatisme dans l'air du temps
Le constructeur ailé ne pouvait se permettre de voir (re)démarrer le train des motos automatiques sans monter dedans, en arrivant après Yamaha et sa FJR 1300 AS (lire notre Essai Moto-Net.Com du 4 décembre 2006), et surtout Aprilia et sa fameuse 850 Mana (lire notre Essai Moto-Net.Com du 12 mars 2008)...
De plus, les maxiscooters ne cessent de prendre des parts de marché aux motos traditionnelles, preuve que l'automatisme a le vent en poupe.
Honda a donc choisi un écrin bien singulier pour y loger sa nouvelle transmission à variation continue "HFT" (Human Friendly Transmission", rien de moins !). L'engin est propulsé par une mécanique éprouvée et archi-connue, qui n'est autre que le V-twin de 680 cc de la Deauville.
Succès garanti
Amateurs de discrétion et de tranquillité : passez votre chemin ! La DN-01 intrigue, interpelle, fascine, agace même... mais elle ne laisse personne indifférent ! Impossible de s'arrêter à un feu ou de stationner sur un trottoir sans être bombardé de questions : "c'est un scooter ou une moto ? c'est dispo à la vente ou c'est un proto ? combien ça vaut ?", etc.
Longue et très basse, la Honda DN-01 ne ressemble vraiment à aucune autre moto. Avec ses lignes tendues et sa gueule de requin, l'avant tranche avec l'arrière qui, lui, rappelle les derniers scooters GT. Cette proue démesurée et ce côté "low rider" futuriste ne sont pas sans rappeler les sensations presque marines que l'ont peut éprouver au guidon d'une Honda 1800 Rune... pour les rares chanceux qui ont eu le privilège de l'essayer !
On regrettera juste le choix des coloris trop foncés (noir et prune) qui ne mettent pas en valeur les lignes de l'engin. Pourquoi pas un beau bordeaux, ou un vert anglais avec une sellerie beige ?
Long, long rider
La position du conducteur sur la DN-01 est très typée custom : l'assise hyper basse de 690 mm rassurera les plus petits gabarits, et la marche arrière en selle n'est qu'une formalité. Heureusement, car les manoeuvres moteur coupé en poussant la moto ne sont pas simples, compte tenu du poids de l'engin (270 kg en ordre de marche) et du guidon assez bas. Il faut aller chercher loin devant les platines de repose-pieds avec les jambes, tandis que le guidon tombe naturellement sous les mains.
Le tableau de bord se trouve repoussé très loin des yeux du pilote, abrité sous son pare-brise fumé : encore un point commun avec la Rune. Naturellement, les commandes à gauche disparaissent, tout comme la poignée d'embrayage et le sélecteur.
A droite, on retrouve les commandes de frein, avec en particulier une grosse pédale peu ergonomique. La nouveauté vient des commodos, qui se voient agrémentés des commandes de la boîte automatique à trois modes.
Equipement mini
Malgré son look de vaisseau spatial, la Honda DN-01 propose des prestations pour le moins basiques. Honda a abandonné le tableau de bord très high-tech du prototype de salon pour ne conserver que le minimum syndical. Pas de GPS (sauf en option, de même que l'alarme), ni même d'ordinateur de bord : il faudra se contenter des fonctions de base de n'importe quelle moto actuelle.
Le carénage très enveloppant et les faux airs de scooter de la DN-01 laissent augurer d'un bel espace de rangement... mais il n'en est rien ! Tout juste peut-on caser l'antivol en U spécifique à la marque sous la selle passager. Heureusement, la moto est équipée de l'anti-démarrage à clé codée HISS.
Par ailleurs, il est très difficile d'attacher un sac à l'arrière sans rayer les poignées passager et impossible d'emporter une sacoche magnétique sur le réservoir couvert de plastique... La DN-01 n'est pas taillée pour le voyage ! Transmission automatique oblige, on trouve un frein de parking à droite du moteur, avec rappel lumineux au tableau de bord pour ne pas l'oublier.
HFT : comment ça marche ?
Avant de partir, il est nécessaire de se familiariser avec la transmission HFT, qui constitue la principale innovation de la DN-01. Elle se pilote grâce à trois commodos : deux à droite et un à gauche du guidon. A droite, on dispose d'un double bouton pour basculer du point mort en prise (Neutral et Drive).
On trouve également, comme la gâchette d'appel de phare à gauche, la touche Mode qui permet de passer de la boîte automatique au mode séquentiel. Mais c'est surtout le double bouton vertical au commodo gauche dont on se sert le plus avec le pouce : en automatique, il permet de passer du mode D (Drive) au mode S (Sport) tandis qu'en séquentiel, il permet de monter et de descendre les rapports grâce aux touches "+" et "-".
L'ergonomie particulièrement bien étudiée permet de se sentir très vite à l'aise avec le fonctionnement de ce système. Et nul besoin de revenir au point mort ou de s'arrêter, tous les modes sont sélectionnables en roulant.
En ville : plus moto que scooter
En ville, on opte bien sûr pour l'un des deux modes automatiques : la transmission à variation continue est le gage de départs canon, car l'embrayage ne "cire" plus comme sur un scooter et la Honda s'élance immédiatement.
Si l'on souhaite adopter une conduite cool, sous la pluie ou avec un passager par exemple, on choisira le mode D (Drive). Ainsi, la moto se montre douce et conciliante.
Si l'on souhaite s'amuser un peu - ou si l'on est pressé -, on passera vite en mode S (Sport) : on sent instantanément la boîte tomber un rapport et on bénéficie dès lors de davantage de frein moteur et de meilleures reprises.
Hormis une largeur un peu excessive (92 cm) au niveau des rétros - très efficaces mais à hauteur de ceux des berlines -, la DN-01 est très agréable en ville. Le moteur issu de la Deauville est souple et suffisamment volontaire pour rouler à un bon rythme. Malgré l'empattement et le poids conséquents et le pneu arrière de 190 mm, la moto s'avère maniable et légère à balancer.
Une fois que l'on a assimilé ses proportions généreuses, on se faufile comme avec n'importe quelle autre moto... Mais moins bien qu'avec un scooter ! Dans les embouteillages de Paris Plage, on peste aussi contre l'assise au ras des pâquerettes qui fait que l'on a du mal à voir et à être vu !
(s)Low rider
En bon low rider qui se respecte, la DN-01 s'apprécie avant tout sur les petites routes à un rythme de balade, les pieds en avant et le nez au vent. La boîte auto convient aussi très bien à cette utilisation. La conduite est intuitive, naturelle et la tenue de cap semble inébranlable. On se prend vite au jeu du "cruising" en profitant du confort de selle très correct.
On peut également flâner à deux, car la capacité de la DN-01 au duo est remarquable. La selle passager est large et moelleuse et les poignées pratiques et bien positionnées. Il n'y a guère que l'amortisseur arrière que l'on pourra trouver un peu trop sec. De plus, le peu de protection assuré par le minuscule saute-vent n'encourage guère aux grandes vitesses. Tout le haut du corps du pilote offre une énorme prise au vent, tandis que les jambes repoussées devant sont soumises à d'importants remous.
De toute façon, le petit réservoir de 15 litres vous obligera à faire des pauses régulières avant que la lassitude et la fatigue ne se fassent trop ressentir (l'autonomie moyenne avant réserve tourne autour des 190 km).
Soft sport
En balade avec d'autres amis motards, on sera inévitablement tenté de titiller un peu la DN-01. Pour ce faire, on passe en mode séquentiel pour jouer de la boîte de vitesses. Rapide et "intelligente", la transmission brille par son agrément de conduite et se montre plus aboutie que celle de l'Aprilia Mana. Elle corrige toutes les approximations du pilote en revenant par exemple d'elle-même en première si l'on s'arrête à un feu en sixième.
Si elle permet de tirer les rapports au rupteur, elle refusera en revanche catégoriquement les gros rétrogradages de sauvage ! Elle permet d'adopter un pilotage sinon sportif, du moins rapide. Ceci, bien entendu, dans les limites de la machine... Et en premier lieu sa puissance, qui reste modeste avec ses 61 ch, soit 4 de moins que sur la Deauville 700.
La Honda permet tout de même d'atteindre de justesse les 200 km/h compteur sur autoroutes allemandes. De plus, on flirte vite avec les limites de la garde au sol et les larges platines de repose-pieds viennent frotter l'asphalte assez vite. Rien d'inquiétant, mais il ne faut pas trop insister non plus !
C'est d'autant plus frustrant que la DN-01 fait preuve d'un comportement très sain et intuitif. Heureusement, elle freine aussi très bien de l'avant comme de l'arrière, en raison de son empattement très long. Couplé avant/arrière (CBS) et doté de l'ABS, le freinage offre une grande puissance et un feeling très appréciable.
L'aDN d'une nouvelle espèce
Si elle souffre de défauts rédhibitoires pour certains - aptitudes sportives limitées, puissance modeste, design discutable - et manque d'aspects pratiques pour d'autres - par rapport à son concept de départ -, la DN-01 parvient à se montrer néanmoins très attachante et les 1000 kilomètres parcourus à son guidon lors de notre essai n'ont fait que confirmer ce sentiment !
De plus, elle est parfaitement dans l'air du temps, en associant plaisir de conduite et sécurité sans trop risquer les points de permis. Si la Honda constitue une offre originale et pertinente, il faut aussi la considérer comme la première d'une nouvelle race de machines.
Mais elle fait payer cher son statut de pionnière : à près de 12 000 euros, ce tarif nous paraît trop élevé au regard de sa cylindrée et de ses prestations...
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