Dakar moto 2015 - étape 8 : Honda s'enlise, Coma en profite
Le froid et la boue ont eu raison des hautes ambitions de Honda sur le Dakar 2015 , ôtant à Joan Barreda Bort ses légitimes espoirs de victoire lors de la huitième étape entre la Bolivie et le Chili. Prudent, Coma termine neuvième de cette étape incroyablement éprouvante et reprend la tête du classement.
Le froid et la boue ont eu raison des hautes ambitions de Honda sur le Dakar 2015, ôtant à Joan Barreda Bort ses légitimes espoirs de victoire lors de la huitième étape entre la Bolivie et le Chili. Prudent, Coma termine neuvième de cette étape incroyablement éprouvante et reprend la tête du classement.
"Un désastre pour toute l'équipe Honda"
Retardé en raison de la pluie, de la visibilité réduite et du froid (2°C), le départ de la deuxième partie de l'étape marathon (sans assistance technique) s'est déroulé avec une certaine appréhension...
Pour beaucoup, il y a l'inquiétude face à des conditions rendues forcément difficiles au regard de la météo, mais aussi les interrogations liées à la fiabilité d'une mécanique révisée soi-même au bivouac.
Pour d'autres, l'excitation des débuts a cédé la place à une insidieuse mais ô combien légitime forme d'angoisse...
Car devant eux l'horizon est plombé, le terrain gras et la traversée du célèbre Salar d'Uyuni (un immense désert de sel formé sur un lac temporairement asséché en Bolivie) se déroule en aqua-planning quasi constant, avec jusqu'à 15 cm d'épaisseur d'eau accumulée !
Les motos glissent, tombent, calent, repartent tant bien que mal pour parfois retomber quelques mètres plus loin... A ce "petit jeu", les organismes s'épuisent, le moral cède et les mécaniques surchauffent en raison de l'accumulation de boue salée.
Face à ces conditions dantesques, la direction de course neutralise la course au km 378 : après une longue liaison de 368 km qui les ramène au Chili, il restera alors 38 km de spéciale à disputer pour atteindre le bivouac d'Iquique. A ce stade, pour certains, cette distance équivaut à rallier la lune !
Lors des points de contrôle, les motards tentent de nettoyer les organes vitaux (circuits électriques, de refroidissement et d'admission, notamment) avec des bouteilles d'eau. Un système "D" souvent par trop insuffisant.
Ils seront ainsi nombreux à devoir jeter l'éponge comme Alessandro Botturi, Michael Metge, Daniel Gouet et Jordi Viladoms, quatre brillants animateurs du Top 20.
Mais la pire déconvenue est très certainement celle vécue par le team officiel Honda, dont le leader Joan Barreda Bort a déjà connu son lot de désagréments la veille après une chute dont il s'est relevé avec le guidon gauche cassé.
Contraint de réparer seul du fait du statut marathon de l'épreuve, l'espagnol se pensait tiré d'affaire après avoir récupéré le guidon de l'argentin Demian Guiral, autre pilote Honda. Mais la chance a décidemment décidé de tourner le dos à Barreda, dont le 450 cc de sa Honda s'étouffe sous la boue...
Les secondes perdues se transforment en minutes pour le leader du général, puis carrément en heures : contraint d'être remorqué via une sangle par son coéquipier Jeremias Israel, l'officiel HRC arrive au bivouac exténué à 19h24, plus de 3 heures après les premiers...
Pour Barreda, déjà trahi l'an passé par la mécanique alors qu'il luttait pour la victoire, la déception est totale, trop pour être partagée sur la ligne d'arrivée...
"Je ne peux pas en parler pour le moment", lâche-t-il le regard vide avant de se réfugier dans son motor home.
Presque aussi effondré, son équipier Jeremias Israel évoque "une étape de m... Nos motos ne sont pas faites pour ça. Celle de Joan a été touchée en premier, puis la mienne aussi".
"Ensuite, il a fallu pousser pour redémarrer. Et j'ai tiré Joan, à la sangle. Pendant peut-être 300 ou 400 km, je ne sais plus. On ne l'a enlevée que pour la descente finale (sur la célèbre dune géante d'Iquique, NDLR)".
L'expédition interminable a aussi tourné au cauchemar pour Helder Rorigues, sixième de l'étape la veille et au classement provisoire, qui rétrograde au 18ème rang au général. "C'était un désastre pour toute l'équipe", affirme le portugais.
"C'est une super nana !"
Toute l'équipe ? En réalité, non : la multiple championne de trial Laia Sanz a stupéfait tout le monde en ralliant l'arrivée de cette journée extrême au cinquième rang, à 2'36 du vainqueur. La souriante espagnole remonte du même coup au neuvième rang au provisoire sur sa Honda officielle, apportant ainsi un réconfort inattendu au HRC.
"Ce matin nous étions plusieurs pilotes à ne pas vouloir partir car il faisait vraiment très froid et c'était dangereux", relate Lai.
"Beaucoup de motos ont ensuite connu des problèmes. Heureusement pour moi, tout s'est bien passé et ma moto a bien marché. J'étais troisième mais malheureusement dans le sable, sur la fin, Quintanilla et Price m'ont passée car ils sont plus rapides que moi. Mais 5ème c'est très, très bien".
Rapide, courageuse... et modeste avec ça ! Car pour David Casteu, onzième à l'arrivée sur sa KTM, la performance de la jeune espagnole est bien plus impressionnante que ce qu'elle en laisse paraître.
"Au ravitaillement essence, on était surtout des anciens", raconte le français, huitième au provisoire. "A part une, qui nous a tous déposés : sur le Salar, c'est elle qui menait la troupe. Elle est incroyable, tout le temps là. C'est une sacrée nana !", lâche avec admiration David Casteu en parlant de la pilote HRC.
"Là, on fait le Dakar !"
Concernant la spéciale et ses difficultés, le tricolore juge de son côté que l'organisateur a eu raison de ne pas interrompre l'étape, comme le suggéraient certains participants au regard des conditions extrêmes.
"C'est ça aussi le Dakar : il faut savoir se gérer, la mécanique, le terrain, le climat... Si c'est pour faire de la dune autour d'Iquique, on vient avec une moto d'enduro et on va s'amuser avec les potes. Là, on fait le Dakar !"
"Il y a une semaine on était en Argentine, à se demander comment on allait faire pour se sortir de cette fournaise à plus de 50 degrés, et ce matin on se demandait si on allait s'en sortir avec nos K-Way et nos lunettes double-écran".
"C'est la course la plus dure au monde, je pense qu'il (Etienne Lavigne, directeur de l'épreuve, NDLR) a eu raison de prendre cette décision. Il y a une génération qui arrive vraiment très fort, mais aujourd'hui on voit bien que l'expérience marche".
Pourtant à l'arrivée, ce sont bel et bien des pilotes moins expérimentés qui se sont attribué les premières places. Le chilien Pablo Quintanilla (KTM) confirme sa montée en puissance entraperçue la semaine passée en remportant sa première victoire, après une lutte acharnée avec le pilote Yamaha Juan Pedrero Garcia et le slovaque Stefan Svitko (KTM).
L'excellent débutant australien Toby Price complète le Top 4 devant Sanz (Honda), De Soultrait (Honda) et Duclos (Sherco). Parti prudemment, Marc Coma rallie l'arrivée à la neuvième position, après avoir lui aussi été retardé par un nettoyage improvisé de sa KTM "à la bouteille" lors d'un check point.
Grâce aux difficultés de ses rivaux Honda, le quadruple vainqueur de l'épreuve reprend toutefois la tête du provisoire, avec 9 minutes d'avance sur Helder Rodrigues et 11 minutes sur le surprenant Quintanilla.
"Il a fallu chercher le meilleur compromis entre la rapidité et la prudence pour éviter les problèmes", relate l'officiel KTM. "C'est la sélection normale, il se passe des choses tous les jours sur le Dakar. Nous allons essayer d'éviter les problèmes jusqu'à la fin".
"Pour l'instant j'en suis là où j'en suis, mais nous verrons petit à petit. L'important, ce sera le dernier jour", rappelle le n°1 dont la grande expérience lui suggère de ne pas se réjouir trop vite de ce retournement de situation...
Au final, seulement 82 motards parviendront jusqu'au bivouac d'Iquique alors qu'ils étaient encore 110 en lice la veille lors de l'étape 7... Des chiffres qui en disent plus long que les mots sur la difficulté de cette 8ème étape qui restera longtemps dans les mémoires !
Résumé vidéo de l'étape 8 du Dakar 2015
Résultats et classement de l'étape 8 moto du Dakar 2015
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