Mêlant allègrement lutte contre le terrorisme et simples contrôles routiers, le ministère de l'intérieur veut interdire la diffusion par "applications smartphone, GPS, sites internet ou réseaux sociaux" de "tout message de nature à signaler les opérations de police dans certains périmètres"... Y compris les contrôles radars !
L'éphémère nouveau futur ancien ministre de l'intérieur, Matthias Fekl, souhaite adopter un "décret portant interdiction de diffuser par l’intermédiaire des services électronique (oui, sans S, NDLR !) d’aide à la conduite ou à la navigation tout message de nature à signaler les opérations de police dans certains périmètres".
En clair, même si le projet de texte ne le mentionne pas explicitement : interdire la possibilité de signaler les emplacements des contrôles radars, alors même que la Cour de cassation vient de rappeler dans un arrêt de septembre 2016 qu'il n’existait en l'état actuel du droit "aucune interdiction d’annoncer la présence des radars et des contrôles routiers à l’aide d’un réseau social".
Comme le veut la procédure dès lors qu'il s'agit d'un projet de règle technique, le gouvernement français doit notifier officiellement la Commission, qui a désormais trois mois (jusqu'au 25 juillet 2017) pour donner son avis et "répondre de façon appropriée".
Si elle estime que le projet crée "des obstacles à la libre circulation des marchandises ou à la libre prestation de services de la société de l'information ou au droit dérivé de l'UE", la Commission pourra émettre un avis circonstancié à l'attention du gouvernement français. La période de statu quo serait alors prolongée de trois mois supplémentaires concernant les produits et d'un mois supplémentaire concernant les services, tandis que Paris devrait communiquer à Bruxelles les mesures prises en réponse à l'avis circonstancié.
"Un impact favorable sur la sécurité routière est attendu", plaide le futur ancien gouvernement français dans sa notification du 24 avril 2017 visiblement écrite avec les orteils d'un stagiaire, à tel point qu'on pourrait presque croire à un "fake"...
En effet, le signalement des forces de l’ordre effectuant des contrôles d’alcoolémie ou de stupéfiants incite certains usagers de la route alcoolisés ou ayant consommés (oui avec un S, NDLR !) stupéfiants (oui sans "des", NDLR !!) à changer d’itinéraire afin d’éviter ces contrôles. Par conséquent, ces signalements ne permettent pas de lutter efficacement contre la conduite en état d’ivresse et après usage de stupéfiants et aux accidents qui y sont associés" (lutter "aux" accidents, bref passons, NDLR).
M. Fekl, par ailleurs conseiller régional de Nouvelle Aquitaine, souhaite donc "interdire la diffusion, au sein de tout service électronique d’aide à la conduite ou à la navigation (notamment : applications smartphone, GPS, sites internet, réseaux sociaux), de tout message ou indication permettant aux usagers de ce service de connaître la localisation des forces de l’ordre dans certains périmètres et susceptible de nuire à l’efficacité des opérations de police administrative de sécurité routière ou des opérations de police judiciaire réalisées".
"Ces périmètres, communiqués par le gouvernement aux exploitants de ces services électroniques, seront ceux où auront lieu certains contrôles sensibles, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou la criminalité organisée, d’actions de sécurité routière, de la recherche de détenus évadés ou de personnes enlevées", justifie le ministre de l'intérieur en assurant que "ces périmètres ne couvriront donc que les contrôles les plus sensibles et ne pourront s’étendre sur plus de vingt kilomètres" et que "l'interdiction ne pourra dépasser vingt-quatre heures".
Une contravention de cinquième classe (1 500 euros d'amende) serait donc appliquée aux exploitants (Coyote, Winkangoo, Inforad, Waze, etc.) qui ne respecteraient pas ces nouvelles dispositions, au moyen d'un nouvel article R. 131-1 du code de la route.
On se souvient que lesdits exploitants s'étaient empressés d'obtempérer en 2011 lorsque le gouvernement (dirigé à l'époque par un certain François Fillon) avait voulu rendre les indications volontairement moins précises.
Les avertisseurs, légaux (à ne pas confondre avec les détecteurs, illégaux), étaient alors passés d'une précision de quelques mètres à de vagues "zones dangereuses" s'étendant sur 500 m en ville, 2 km hors agglomération et carrément 4 km sur autoroute !
Plus récemment, c'est le sénateur (LR) de l'Hérault, Jean-Pierre Grand, qui voulait interdire les moyens de prévenir de la présence de radars et de contrôles de police. Avec ce nouveau projet de décret, les systèmes d'aides à la conduite devraient impérativement ignorer des zones de 20 kilomètres... Autant dire qu'ils perdraient toute utilité !
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