Le concessionnaire Honda National Motos fait son retour en endurance avec les 24 Heures Motos ce week-end puis le Bol d'Or. Quels sont les objectifs de cette équipe privée ? Quels sont les atouts et les faiblesses de la nouvelle CBR 1000 RR 2017 ? Interview des pilotes et de Stéphane Haddadj, team manager et patron de la concession.
Les lecteurs de MNC - qui, comme chacun sait, ont un peu plus de chance mais aussi davantage de mémoire que les autres - se souviennent que la dernière victoire Honda aux 24H Motos du Mans remonte à... 2006 !
Cette performance était due à la CBR n°55 du concessionnaire National Motos fondé en 1969, emmenée à l'époque par Frédéric Protat, Olivier Four et Dani Ribalta sous l'impulsion du patron Pipo Haddadj, dit Baldit.
Auparavant, National Motos avait décroché un premier podium aux 24 Heures Motos en 1992 avec Guy Bertin, Adrien Morillas et Arnaud de Puniet (le père de Randy). Puis Pipo s'est éteint en 2012 mais son fils a pris la relève : "plus de 150 pilotes sont passés par notre team, souvent tremplin pour les teams d'usines, avec notamment Guy Bertin, Guy Battesti, Bernard Fourcadet, Philippe Bouzanne, Sébastien Scarnato, Olivier Four, Philippe Monneret, Daniel Rouge, Adrien Morillas, Jean-Claude Chemarin", se souvient Stéphane Haddadj (ci-dessous à droite lors de la victoire de National Motos en 2006).
Absent l'an dernier alors qu'il était engagé en endurance sans interruption depuis 1971, le team Honda National Motos revient cette année avec Emeric Jonchière, Nicolas Salchaud, Hikari Okubo et Jonathan Hugot comme remplaçant au guidon de la nouvelle CBR 1000RR 2017.
Emeric Jonchière, pilote bleu de la Honda National Motos n°55, explique que ses objectifs personnels sont de se "faire plaisir au maximum sur cette nouvelle Honda, et si possible d'aller chercher la meilleure place dans notre catégorie (EWC, NDLR). On verra avec le team quelles sont les consignes exactes, mais on manque encore de développement avec cette moto arrivée très tard".
Nicolas Salchaud, brassard jaune, décrit pour sa part un triple objectif pour ces 24H Motos au guidon de la CBR : "le premier est d'apprendre de cette nouvelle Honda, qui est une bonne base mais que nous connaissons peu et sur laquelle il y a du travail. Par exemple il n'y a pas de kit électronique disponible, ce qui impacte de nombreux paramètres châssis comme moteur".
"En conséquence la performance pure, même en qualifications, ne sera pas recherchée car la moto demande encore du développement pour ça", poursuit Nicolas, vainqueur des 24H Motos 2013 sur la ZX-10R n°11 du team SRC Kawasaki. "Deuxièmement, réaliser une course solide pour viser un top 5 qui serait déjà un bon résultat pour le retour du team en endurance avec cette nouvelle moto. Mieux serait une immense joie ! Et troisièmement, intégrer notre japonais Hikari Okubo qui découvre quasiment la discipline".
Enfin pour le pilote remplaçant Jonathan Hugot (brassard vert), vainqueur des Coupes de France Promosport 2016, le but est "pour le moment de faire de bonnes qualifications sur cette moto "privée" qui a une histoire quand même. Et de refaire les belles performances du Superbike il y a 15 jours, voire mieux ! L'objectif est de finir cette course et d'emmagasiner plein d'informations sur cette nouvelle CBR 2017... et on fera les comptes dimanche à 15h !"
Moto-Net.Com : Comment expliquez-vous le fait qu'aucune Honda ne se soit plus jamais imposée au Mans depuis votre victoire il y a 12 ans ?
Stéphane Haddadj, team manager et patron de National Motos : C'est essentiellement une question de moyens. Les équipes Honda ne sont pas soutenues par l'usine comme peuvent l'être les teams officiels Suzuki ou Yamaha. La n°111 (Julien da Costa, Sébastien Gimbert et Freddy Foray, NDLR) est soutenue par Honda Europe mais elle n'a pas les moyens du HRC, tout comme la n°5 de FCC TSR soutenue par Honda Japon. De notre côté, malgré l'aide de Honda France, nous restons une équipe privée qui fonctionne avec des bénévoles. Et la priorité du HRC n'est pas de s'investir en endurance.
MNC : Que s'est il passé en 2016 ?
S. H. : Nous manquions de moyens et ça n'aurait pas été raisonnable pour la concession, nous avons donc préféré faire une pause pour mieux préparer notre retour. Nous en avons profité pour renouer contact avec nos partenaires (Ohlins, Tournay, Motul, Pirelli...) et sortir un livre, L'aventure National Motos, qui retrace l'histoire de notre équipe depuis sa création en 1971.
MNC : Comment avez-vous préparé la nouvelle CBR 2017 pour les 24H Motos ?
S. H. : Nous disposons de la CBR 1000 RR "normale", pas de la version SP. Elle est la plus préparée possible mais elle reste très proche du modèle de série car aucun kit racing ni pièces HRC ne sont disponibles. On a donc tout développé nous-mêmes comme la ligne d'échappement Arrow, les carénages Tournay, les suspensions Ohlins mais qui sont différentes de celles du modèle SP2 (la version ultra haut de gamme distribuée à seulement 500 exemplaires dans le monde pour répondre à l'homologation WSBK, NDLR)... On a eu la moto très tard, fin février. L'idéal aurait été de rouler sur la SP2 mais elle n'était pas disponible (seul le team de la Honda n°111 bénéficie de la CBR 1000 RR SP2, NDLR)...
MNC : Comment avez-vous choisi vos pilotes 2017 ?
S. H. : Nous avons voulu mélanger des pilotes expérimentés (Emeric Jonchière et Nicolas Salchaud) avec d'autres plus jeunes (Jonathan Hugot) ou qui découvrent la discipline comme le japonais Hikari Okubo, coéquipier de Jules Cluzel en WSSP. Il fallait que tous les pilotes s'entendent bien, c'est important lorsqu'on partage la même moto pendant une course de 24 heures ! Hikari Okubo était disponible - ce qui n'est pas toujours le cas des pilotes engagés sur les championnats internationaux -, mais surtout il était motivé et son approche de la course nous a convaincus.
MNC : Quels sont vos objectifs pour ces 24H Motos ?
S. H. : Sur le papier on ne peut pas prétendre à la victoire, c'est réservé aux motos d'usine. Mais ce n'est pas du tout frustrant, car chacun fait au mieux en fonction de ses moyens. Les teams officiels disposent de budgets au minimum 20 fois supérieurs à ceux d'une équipe privée comme la nôtre et le rythme des motos d'usine s'éloigne de plus en plus de celui des motos privées. Notre objectif est de jouer la régularité en restant le plus proche possible des usines. Finir dans le top 5 serait déjà très bien !
MNC : Qui seront vos principaux adversaires ?
S. H. : Nous nous battrons certainement avec des équipes comme la Kawasaki Bolliger, la Suzuki R2CL, la Yamaha tchèque (Maco Racing n°14, NDLR) et les autres Honda de RAC 41 ou Motors Events. Certaines équipes connaissent leur moto par coeur et disposent de pièces racing depuis longtemps !
MNC : Pourriez-vous disputer l'intégralité du championnat du monde ?
S. H. : Nous sommes engagés cette année sur les 24 Heures motos et le Bol d'Or, avec peut-être une autre manche européenne. Le championnat n'est pas à l'ordre du jour, toujours pour des raisons de moyens...
.
.
.