Blessé à la main lors de la seconde course WorldSBK à Aragon (Espagne), Sylvain Barrier ne sera malheureusement pas de retour ce week-end à Donington Park. Pour Moto-Net.Com, le pilote du team Kawasaki Pedercini fait le point sur sa situation. Interview.
Moto-Net.Com : Salut Sylvain, nous venons d'apprendre que tu ne serais pas de retour à Donington Park... Comment va ta main ?
Sylvain Barrier : Alors... J'avais fait des essais avant l'épreuve d'Imola et les plaques avaient bougé d'un ou deux millimètres, je ne me souviens plus exactement... Toujours est-il que du coup, j'ai dû tout stopper immédiatement et j'avais uniquement le droit de faire de la course à pied. J'ai passé une visite médicale la semaine dernière et le médecin m'a donné le droit de reprendre le sport, et même les tests moto, mais pas encore la compétition.
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MNC : Peut-on espérer te voir rouler début juin à Misano ?
S. B. : J'aimerais, oui. Maintenant, si tout ne s'est pas reconsolidé correctement, qu'il subsiste des risques de casse ou que les plaques se tordent comme l'a vécu Petrucci, franchement, revenir courir ne servira pas à grand-chose. Je remonterai sur la moto quand je serai de nouveau à 100% de mes capacités. Parce qu'en voulant trop attaquer pour compenser la moto et ses réglages qui ne sont pas au top, en voulant souder, boum, tu "montes". Ca explique pourquoi j'en suis là. Et ça explique la chute de Lucas aussi.
MNC : Justement, tes remplaçants... Anthony West a terminé 9ème de sa toute première course en WorldSBK à Sepang, puis 5ème sous la pluie en seconde manche. Lucas Mahias, ton précédent remplaçant, a lui aussi accroché un Top 10 sur le sec. Cela te rassure quant au potentiel de la moto, cela te met la pression, ou un peu des deux ?
S. B. : Si la moto était vraiment au-dessus du lot, Lucas serait toujours là pour me remplacer. Or ce n'est pas le cas depuis sa chute à Imola. Il faut savoir que la Ninja que pilotent Sykes et Rea n'a rien à voir avec celle qu'on peut avoir chez Pedercini. Alors d'accord, les moteurs sont préparés au même endroit, chez Akira. OK, l'électronique Magneti Marelli est basique, ainsi que les suspensions... Mais ce sont leurs seuls points communs.
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Je dois admettre que ce qu'Anthony West a fait en première manche à Sepang était impressionnant. Il s'est donné à 100%, il a vraiment fait du très, très bon boulot. Après sous la pluie, c'est Anthony West : l'une des références mondiales dans le domaine ! Il a gagné une course de Moto2 dans ces conditions (le Grand Prix des Pays-Bas 2014, NDLR) et il a aussi bien tourné sur la Kawasaki de MotoGP (en succédant à Olivier Jacque, NDLR). Mais c'est sûr que partir de la 11ème place et finir 5ème, c'est beau !
On verra ce que ça donnera à Donington Park, voire à Misano si je ne suis pas de retour. L'équipe va peut-être recevoir de nouveaux châssis, de nouveaux bras oscillants... Parce qu'Anthony s'est plaint à peu près des mêmes choses que moi. Mais ce ne seront pas des pièces d'usine.
MNC : Le team Pedercini ne devait pas prendre du gallon en 2016 et profiter de matériel plus performant en 2016 ?
S. B. : Si justement. En début d'année, j'avais signé pour une moto "Factory" préparée par le chef mécano et les mécaniciens qui s'occupaient de David Salom ces trois dernières saisons. Chaque week-end de course, le chef ingénieur de Sykes ou de Rea (en fonction mon style de pilotage, nous devions le définir) devait étudier mes problèmes avec moi, une heure par jour. Mais ça ne s'est jamais fait : Guim (Roda, responsable du team Kawasaki d'usine, NDLR) nous a expliqué qu'il devait gagner le championnat, qu'il ne pouvait pas nous accorder son attention. Au final, je ne bénéficie ni de la moto, ni du soutien prévus. Mon chef ingénieur est mécano dans un garage, mon chef mécano montait les pneus il y a encore trois ans... Ce n'est pas ce qui était prévu à l'origine.
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Pour t'illustrer la situation, le chef ingénieur chez Kawasaki est payé 150 000 euros à l'année. Moi, pour rouler, j'ai dû trouver un budget de 250 000 euros. C'est comme ça. T'as beau tourner le problème dans tous les sens, ça ne peut pas marcher. C'est dommage, parce qu'après l'histoire avec BMW (lire notre Interview MNC du 9 avril 2015, NDLR) on m'avait vendu un nouveau projet super sur le papier. Il fallait compter 200 000 euros de location pour la moto Factory et 50 000 euros pour les frais d'engagement, les pneus, la clinique mobile et tout le bazar. Au final, il n'y a rien de "Factory"...
MNC : Et la situation ne pourra pas évoluer en cours de saison ?
S. B. : Malheureusement non. J'ai discuté avec Kawasaki et ils m'ont expliqué qu'ils n'avaient pas suffisamment de moyens, de personnel pour fournir tous les teams. Lucio (Pedercini, le boss du team éponyme, NDLR) pensait pouvoir récupérer les châssis et les bras oscillants de 2015, mais pour cela il aurait fallu utiliser les moteurs de 2015, ce qui était hors de question. Du coup, les anciens châssis sont repartis au Japon et ont été broyés...
MNC : Ta moto est donc un modèle 2016 très proche du modèle de série ?
S. B. : La moto avec laquelle j'ai roulé la dernière fois à Aragon avait un châssis d'origine. Lucas et Anthony utilisaient la même chose, avec un bras oscillant italien. A priori à Donington, le châssis devrait être renforcé et profiter des modifications possibles au niveau de la direction grâce aux systèmes de bagues. Le bras oscillant, lui, devrait venir de chez Tech Solution, une société française qui fait les châssis. D'ailleurs, j'ai entendu dire que le team Pucetti (Sofuoglu) avait signé un pré-contrat avec Marco Melandri pour du Superbike l'an prochain... Mais ça a le temps de changer bien sûr.
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MNC : Tu auras loupé une grande partie de la première moitié de la saison... Que vises-tu pour la seconde ?
S. B. : Mes objectifs restent malgré tout le Top 10. Lucas a prouvé que c'était faisable à Assen en première manche. Mais il ne faut pas oublier qu'il y avait eu cinq chutes devant, c'est pas non plus à se taper le popotin par terre ! En deuxième manche sur le séchant, il fait 13ème à un tour du premier... C'est compliqué de juger le niveau de la moto.
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En termes de chronos aux essais, Lucas et Anthony ont tourné grosso modo comme moi : ils se trouvaient à 1 ou 1,5 seconde du premier. À Sepang c'était encore différent en raison du nouveau revêtement. J'avais jamais vu un Sykes mettre 8 dixièmes en qualif' au deuxième. Quasiment une seconde ! Mais le circuit, entièrement resurfacé, était pour ainsi dire nouveau. Du coup, le temps que les pilotes se mettent en place, on laisse passer la première course et on se penche sur le warm up, au début du troisième jour. Là, West se classe 12ème à 1,7 seconde du premier. Et l'équipe se rend compte que les problèmes restent les mêmes... Hors aléas climatiques ou chutes, la moto ne peut pas faire beaucoup mieux que 10ème.
MNC : Pour conclure, quel est ton programme pour les semaines à venir ?
S. B. : Je pars ce week-end faire des essais à Jerez avec Michelin, c'est vraiment un travail que j'adore faire. Par la suite, j'effectuerai d'autres tests de développement pour Kawasaki... Et pour me faire un peu plaisir aussi ! Je n'ai pas pu rouler énormément cet hiver à cause de soucis sur la moto, et puis mon roulage en course a de nouveau été limité.
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