Réputés chers et sélectifs, les stages de pilotage moto tendent à se démocratiser pour le plus grand bonheur des motards. Pour mesurer leur intérêt, Moto-Net.Com a suivi la formation de Trajectoire GP sur le circuit de la Ferté Gaucher (77). Reportage.
Face à la répression routière croissante (lire notamment MNC du 28 avril 2010 : les Français face à la répression routière), bon nombre de motards "sportifs" trouvent désormais sur les circuits moto le dernier terrain d'expression de leurs penchants pour l'arsouille.
Non pas qu'une départementale viroleuse à souhait ne suffise pas à taquiner du repose-pied ou martyriser du gommard (sans dépasser de beaucoup les vitesses légales), mais force est de reconnaître que pour jouir du plein potentiel d'une hyper (ou même super) sport, la piste est parfaitement indiquée.
Le prestige de la compétition aidant, les motards sont donc de plus en plus nombreux à vouloir frôler les vibreurs en dessinant de fluides arabesques, ou tenter de faire les freins à leurs potes à plus de 200 km/h dans un environnement sécurisé ! Reste que la pratique du circuit demande tout de même une certaine expérience...
Plus complets qu'une simple journée de roulage, les stages de pilotages revendiquent justement une formation éclairée et un accompagnement personnalisé des élèves. Autrefois réservé à une certaine élite, ils se sont progressivement ouverts à un public plus large et moins expérimenté, avide de conseils pour acquérir les premiers bons réflexes et progresser en toute sécurité.
Pour juger l'intérêt et l'accessibilité de ces formations spécifiques à la moto, d'une durée moyenne de deux jours, Moto-Net.Com a choisi de suivre les élèves de l'école de pilotage Trajectoire GP pour leur premier stage de la saison sur le nouveau circuit de la Ferté Gaucher (77).
Sus aux mauvais réflexes !
Francis Quinet, fondateur de Trajectoire GP, est catégorique : "quel que soit le niveau du motard, les stages de pilotage apportent un vrai plus. Les bases (position, regard) sont consolidées, tandis que les phases techniques (trajectoires, freinages, accélérations) sont soigneusement analysées et décortiquées par nos instructeurs diplômés d'Etat", nous explique cet ancien pilote en montant son barnum devant les infrastructures du circuit.
Réunis autour d'un sympathique "café-croissant", les premiers élèves profitent de l'accueil chaleureux de l'équipe composée d'une dizaine de personnes et d'une poignée de bénévoles : l'ambiance est détendue et le courant passe rapidement entre chaque participant.
Éclectique, ce groupe de 25 pistards va pourtant du trentenaire énervé en R6 équipée piste au quadra venu avec femme et enfants, en passant par des quinquas (et même plus !) qui viennent s'amuser aux commandes de leurs roadsters du quotidien... ou d'une sportive préparée comme une meule de compét' !
Deux groupes de niveaux
Scindée en deux groupes de niveaux, la joyeuse troupe écoute les consignes de sécurité données par les moniteurs : Laurent Brian (pilote en championnat de France Superbike avec sa structure Brian Racing Team) et Christophe Cogan (ex-pilote d'endurance, 12ème du Mondial Supersport en 2003).
L'accent est mis sur la sécurité (respect des consignes et des drapeaux, notamment) tandis que la performance est reléguée au second plan : pas question de se tirer la bourre sans réfléchir, mais bel et bien d'apprendre à rouler "proprement" sans se mettre en danger.
Alternant les briefings en salles aux ateliers pratiques sur le circuit seine et marnais, la formation Trajectoire GP débute par un cours théorique sur l'importance du regard et de la position. "Avoir une bonne position - les fesses déhanchées et reculées sur la selle, le bras intérieur fléchit dans le prolongement du guidon et la jambe extérieur bien calée autour de la moto - est primordial pour inscrire la moto en virage", martèle Christophe Cogan.
"Bien que cela constitue une base incontournable pour progresser, il s'agit sans doute d'un des points les plus délicats à enseigner aux élèves : la plupart ont des années de pratique sur route ou sur circuit et il faut parfois se montrer très insistant pour leur faire changer d'habitudes..., nous glisse le vice-champion du monde d'endurance 2004.
Les bases du pilotage
Appliqués, les élèves vont s'entraîner à maîtriser ce b.a.-ba du pilotage en zigzaguant entre des cônes : filmé par les moniteurs, chaque pistard pourra se voir et décortiquer sa façon de faire lors d'un débriefing. Les exercices s'enchaînent ensuite sans temps mort : freinages, trajectoires, point de déclenchement et point de corde sont ainsi analysés en salle, avant d'être matérialisés sur un ou plusieurs virages du circuit.
Tour à tour, les élèves passent devant le moniteur qui consigne les moindres faits et gestes par écrit et mesure précisément la progression de chacun : réalisés à moyenne vitesse, ces passages répétés gagnent rapidement en fluidité. "Grâce à ce stage, tu apprivoises des automatismes hyper efficaces : le gain est énorme quand tu retournes sur circuit par la suite !", nous assure Jean-Baptiste, venu du Val d'Oise pour participer à son deuxième stage Trajectoire GP sur son R1 "mi-route mi-piste".
Venu de Vendée, Franck s'est quant à lui vu offrir ce stage par son épouse, également présente sur place. Pour lui, "participer à ce type de formation a toujours été un rêve : après quelques journées de roulage libres où les différences de niveau sont parfois trop importantes pour apprendre et se faire plaisir, j'ai pris conscience que je n'avais pas forcément les bonnes bases et qu'il me fallait des conseils avisés pour progresser".
Ravi du déroulement de ce stage, Franck est persuadé de l'intérêt de cette démarche, même lors de ses futures virées sur route : "Je suis plus serein sur ma moto, je connais mieux ses limites et je sais désormais ce que je peux lui demander en cas de situation d'urgence, sans prendre de risques inconsidérés".
"An-ti-ci-per !"
Après une nuit de sommeil réparatrice, les 25 participants enfilent de nouveau leur cuir pour la seconde journée. Certains abordent des traits tirés ("j'ai découvert des muscles dont j'ignorais l'existence !", marmonnent certains en reprenant le guidon !), mais tous exhibent le même sourire et la même soif d'apprendre que la veille !
Ensoleillée, la journée risque cependant d'être éprouvante : "pensez à vous hydrater copieusement entre chaque session et à profiter des lignes droites pour bien respirer, afin d'oxygéner vos muscles et ainsi éviter l'apparition de la fatigue et des crampes", préviennent les moniteurs.
Car il s'agit de ne pas mollir : après quelques tours de reconnaissance derrière l'instructeur, celui-ci profite des deux tracés distincts de l'Aérosphalte LFG (une partie lente et technique de 1,6 km et une partie rapide de 2 km) pour isoler un délicat enchaînement de trois virages : d'abord arpenté à pied, ce pif-paf débouchant sur un gauche à 90° est divisé en plusieurs étapes matérialisées par des cônes.
"Immédiatement après la sortie du virage précédant cet enchaînement, votre regard doit se porter sur le cône indiquant le premier point de déclenchement", explique Christophe. "Arrivé à sa hauteur, vos yeux doivent déjà être rivés sur le premier point de corde, puis sur le point de sortie et le prochain point d'entrée du second virage, et ainsi de suite", rappelle l'instructeur qui insiste sur la notion d'anticipation.
"La plupart des stagiaires sont parfois dépassés par la vitesse et perdent alors leurs repères visuels : faute d'anticipation, ils plongent trop tôt à la corde avec une vitesse d'entrée insuffisante, et se retrouvent au point de corde avec beaucoup d'angle et peu de vitesse", nous explique Christophe en observant les premiers passages.
Pour éviter ces entrées de courbes trop timides, Trajectoire GP impose ensuite d'emprunter le circuit sinueux en troisième, sans toucher aux freins ni à l'embrayage ! Stressant de prime abord, l'exercice se révèle en fait bigrement instructif : on apprend à gérer finement les gaz et surtout à profiter de tout l'espace disponible pour ralentir la moto uniquement en la faisant plonger de façon autoritaire à la corde.
Progressivement, les effets conjugués des différents exercices commencent à se faire ressentir. Sous le regard satisfait de Francis Quinet et de son équipe, chaque élève gagne en vitesse et en précision sur l'intégralité du circuit : pour certains, le gain en confiance et en rapidité est énorme, tandis que d'autres ont su remettre en question leurs acquis pour progresser de manière évidente.
Après un dernier cours sur la gestion du frein moteur, les principaux réglages de suspensions, le passage de vitesse sur l'angle et les dépassements, les stagiaires ont de nouveau accès au circuit LFG pour une ultime session libre : forts de deux jours d'apprentissage, chacun y va de bon coeur en essayant d'appliquer tous les précieux conseils !
L'addition s'il vous plaît !
Lors de la remise du diplôme final, nos 25 pistards sont unanimes : les stages de pilotages, c'est du tout bon ! La progression est immédiatement perceptible, d'autant que les conseils personnalisés permettent de s'affûter à son rythme et d'identifier ses forces et ses faiblesses.
Trajectoire GP |
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Accessibles à tous, les stages de pilotage Trajectoire GP mettent la conduite d'une sportive sur circuit à la portée du débutant ou peaufinent le pilotage des plus aguerris. Un grand écart qui se monnaye cependant au prix fort : 599 euros pour les deux jours !
Bien que 100 euros de remise soient accordés aux propriétaires de motos Honda (partenaire du circuit et de Trajectoire GP, qui loue des 600 Hornet et des CBR600RR contre 249 euros par jour), l'addition reste élevée, d'autant qu'elle n'inclue pas les repas du soir et l'hébergement et qu'il faut y ajouter les frais de déplacements, d'essence, de pneumatiques et la nécessité de posséder un équipement piste complet ou de le louer à Trajectoire GP (40 euros la journée pour une combinaison Berick et une dorsale). Comme tous les sports mécaniques, pratiquer ou apprendre la piste demande une enveloppe budgétaire qui n'est, hélas, pas à la portée du premier venu...
Pour autant, le tarif n'a rien d'injustifié par rapport à la qualité de l'enseignement dispensé : absolument tous les participants interrogés par Moto-Net.Com estiment que le rapport qualité/prix de la formation Trajectoire GP est "plus que positif". Beaucoup songeaient d'ailleurs déjà à s'inscrire pour les prochaines dates au soir du deuxième jour : un signe qui ne trompe pas !
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